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25 janvier 2024

★★★½ | La salles des profs / The Teacher’s Lounge (Das Lehrerzimmer)

★★★½ | La salles des profs / The Teacher’s Lounge (Das Lehrerzimmer)

Réalisation Ilker Çatak | Dans les salles du Québec le 26 janvier 2024 (Métropole Films Distribution)
Une enseignante dédiée tente de découvrir la vérité sur une série de vols qui ont lieu à son école. Sans réel soutien de ses collègues, de la direction ou des parents, elle se lance dans une croisade dont elle ne ressortira pas indemne. À la fois drame social et suspense, le film joue avec brio sur cet équilibre de genres. Alors qu’une enquête se déroule sous nos yeux, on assiste également à une critique d’un système scolaire souvent rigide.
La force du film se trouve dans l’interprétation de Léonie Benesch qui incarne avec nuance une enseignante idéaliste qui ne veut que le bien de ses élèves et de sa communauté. Plus on avance dans le film, plus elle sera confrontée à ses idéaux. Ses doutes deviennent nos doutes. On se demande si au final, elle fait partie du problème ? Le désir aveugle de justice a probablement un prix. L’école devient alors le reflet d’un problème plus large de société.
Le film brouille les cartes entre les notions de bien et de mal, héros et antihéros et pose des questions morales sans pour autant prendre partie. On ressort de cette expérience cinématographique confrontés à nos propres idéaux. Et si finalement, on faisait aussi partie du problème?

1 juin 2023

★★★ | La nuit du 12

★★★ | La nuit du 12

Réalisation : Dominik Moll | Dans les salles du Québec le 2 juin 2023 (Cinéma du Parc)
La nuit du 12 nous plonge dans les dessous d’une enquête policière. La nuit du 12, Clara rentre chez elle. Sur la route, elle est brûlée vive. Par qui ? Pourquoi ? On ne sait pas. L’enquête n’est toujours pas résolue. Le film s’ouvre d’ailleurs sur des statistiques de nombreux crimes non résolus en France. Il n’y a aura pas de résolution. Par contre, le film dressera un constat lié à la condition des femmes ou plutôt aux rapports violents des hommes envers les femmes.
Présenté l’an dernier au Festival de Cannes, le film de Dominik Moll est basé sur des faits réels que Pauline Guéna a adaptés en roman. Cette dernière a d’ailleurs collaboré au scénario. Le film met en lumière le travail d’une équipe d’enquêteurs qui tenteront de découvrir la vérité sur ce crime atroce. Dès l’entrée en matière, le cinéaste prend le parti de s’éloigner de tout ce que l’on a l'habitude de voir dans les films ou de les séries d’enquêtes (refusant par le fait même les influences de la série policière ou du true crime). Le rythme est lent et méthodique. Moll évite les effets sonores chocs ou la musique qui force les tensions dramatiques. Il nous plonge dans le quotidien, où la banalité du travail croise la violence de la tragédie.
Ce qui fait la force du film est certainement la position féministe, pleinement assumée. Une équipe d’hommes enquêtent sur le meurtre d’une femme et sont confrontés à leurs préjugés et à leur biais. Il y a d’ailleurs un moment très fort entre une jeune recrue qui confronte le chef d’équipe sur le fait que les hommes commettent des crimes et que ce sont aussi les hommes qui font la police.
La nuit du 12 est une œuvre qui nous habite longtemps après l’avoir vue, pour ses qualités cinématographiques, mais surtout pour ses qualités humaines.

16 décembre 2022

★★★½ | Geographies of Solitude

★★★½ | Geographies of Solitude

Réalisation : Jacquelyn Mills | Sortie dans les salles du Québec le 16 décembre 2022 (Eyesteel Films)
Présenté lors de la dernière édition de la Berlinale, où il a remporté plusieurs prix, Geographies of Solitude de Jacquelyn Mills est une impressionnante immersion cinématographique. Avec une sensibilité et une écoute hors du commun, la cinéaste va à la rencontre de Zoe Lucas, une artiste reconvertie en naturaliste, qui tente de préserver l'équilibre naturel de l'île de Sable (île au large de la côte de la Nouvelle-Écosse).
Armée d'une caméra 16mm, la cinéaste propose un double portrait: celui du territoire ainsi que celui de la femme qui l'habite depuis des années. Le film se déploie à la manière d'une expérience visuelle et sensorielle. On a presque l'impression d'explorer le lieu en temps réel, et ce, malgré la structure narrative qui est tout sauf linéaire. On se retrouve à la limite entre l'errance et une visite guidée. On pourra entendre par moment des bribes de conversations entre la cinéaste et Lucas ou la voix de la protagoniste enregistrée lors de conférences pendant lesquelles elle explique la méthodologie derrière son travail (qui est en soi très tactile).
Cette matérialité du geste et des rituels se retrouvent dans la technique utilisée pour tourner le film. La cinéaste a fait le choix d'exposer, d'enterrer et de développer une partie de la pellicule avec des éléments naturels de l'île, ce qui engendre des images hors du commun.
Malgré la beauté des paysages et de la faune, on demeure à l'opposé du film carte postale. On soulignera d’ailleurs la précision du montage et de la bande sonore qui donnent vie à l'île tout en nous révélant l'importance du travail qu'accompli Lucas. Geographies of Solitudes est impossible à fixer dans le temps. On se réfère à la fois au passé, au présent et à l'avenir en soulevant des réflexions pertinentes sur notre responsabilité face à la crise environnementale.

14 juillet 2022

★★★ | La croisade

★★★ | La croisade

Réalisation : Louis Garrel | Dans les salles du Québec le 15 juillet 2022 (Maison 4:3)
Avec sa plus récente offrande cinématographique, Louis Garrel met en scène de manière sensible un film dont il signe aussi la coscénarisation. La croisade pose un regard à la fois lucide et ludique sur des thèmes et des enjeux universels. On se retrouve donc devant le sort de la planète qui est en jeu. Il faut absolument la sauver. Qui de mieux que des enfants pour y parvenir.
Sans jamais tomber dans la condescendance ou dans un regard moralisateur, Garrel met en scène une charmante fable à saveur écologique. Le réalisateur parvient à créer des parallèles entre la situation critique que nous vivons présentement de manière collective sans jamais oublier qu’il doit aussi divertir son public. La jeunesse prend en charge le futur de la planète en tentant de faire une révolution de manière peu commune. Ici il n’est pas tant question d’accuser les plus vieux, même si on comprend les nombreux sous-entendus face à l’inaction des générations précédentes.
Le réalisateur a un certain don pour diriger les plus jeunes. On s’attache rapidement à eux ainsi qu’à leurs convictions. On les suivrait jusqu’au bout du monde pour nous aussi faire partie de ceux qui vont faire une différence. Au final, La croisade est une œuvre divertissante qui fait sourire plus d’une fois mais malgré tout, on ne peut s’empêcher de penser qu’il s’agit d’un cri du cœur, d’un appel à l’action. Pour un présent et inévitablement un futur meilleur.

1 avril 2022

★★★½ | Le genou d'Ahed / Ahed's Knee (Ha'berech)

★★★½ | Le genou d'Ahed / Ahed's Knee (Ha'berech)

Réalisation Nadav Lapid | Dans les salles du Québec le 1er avril 2022 (Cinéma Du Parc)
Une route pluvieuse, une motocyclette file à toute vitesse. Sous le casque, une jeune femme qui se rend à une audition pour interpréter le rôle d’Ahed, adolescente qui a osé défier les forces armées israéliennes.
Le genou d'Ahed nous donne l'impression d'explorer une proposition déjà vue maintes fois au cinéma. Celle du film dans le film et du créateur qui doit lutter contre les conditions difficiles afin de créer une œuvre à la hauteur de ses ambitions. Nadav Lapid détourne rapidement et habilement les attentes en livrant une chronique incisive sur la relation entre l'artiste et l'État. À travers l'apparent cynisme du personnage d'un réalisateur invité à présenter l'un de ses films dans une petite ville, Lapid propose une exploration des liens que l'on entretient avec l'art (en tant que public ou créateur). Peut-on simplement consommer ou concevoir une œuvre dans le but d'échapper au réel ? Peut-on vraiment échapper au réel ou espérer le transformer à travers l’acte de création.
Ce combat entre réalité et fiction est soutenu par le combat interne du personnage principal lorsqu'on lui impose de choisir dans une liste de sujets à aborder lors de la discussion qui aura lieu après la projection de son film. C’est à l’extérieur de la salle de projection (le réalisateur déteste voir ses films) qu’on découvre l’étendue la complexité des effets de l'État sur sa population.
Sans jamais être lourd ou moralisateur, le film inscrit de manière presque ludique un tendre plaidoyer sur la nécessité de la création artistique et plus encore, de sa capacité à rejoindre tout type de public. La trame musicale, l’interprétation captivante de l’ensemble des comédiens, la structure narrative éclatée ainsi que les mouvements de caméra dynamique nous démontrent la maîtrise de la mise en scène.
Le genou d'Ahed est une œuvre saisissante qui ne cherche pas à imposer de vérité si ce n'est que l’acte de création est un risque qui ne devra pas reposer sur la répétition de schémas préétablis.