Vues d’Afrique 2012 : Sur la planche ****

Réalisatrice : Leïla Kilani

Badia (Soufia Issami) est employée dans une usine où elle passe ses journées à décortiquer des crevettes. Le soir venu, avec trois amies, elle parcourt les rues et les appartements de Tanger à la recherche d’un coup à faire pour arrondir ses fins de mois difficiles.

Sur la planche est incontestablement LE film de fiction à ne pas manquer à l’occasion de ce 28e Festival Vues d'Afrique. Il nous plonge dans un Maroc citadin et nocturne aux côtés de quatre furies, en s’attardant particulièrement sur Badia, écorchée vive au regard chargé de hargne et au phrasé de mitraillette, interprétée par une inconnue terrifiante de naturelle (Soufia Issami, bluffante).

La réalisatrice Leïla Kilani nous livre ici un premier film de fiction collant à la réalité et devant probablement beaucoup à ses débuts de documentariste. Sa faculté à suivre à une vitesse folle son héroïne survoltée n'a rien à envier aux frères Dardenne tant la maitrise de la caméra hyper nerveuse, mais sans agitation inutile, est impressionnante. Le rythme de l'ensemble (aussi bien à l'intérieur des scènes que dans leurs enchainements) est exemplaire et ne laisse presque aucun instant de répit au spectateur, sauf pour se poser en fin de métrage sur un visage dont les yeux vont se remplir de larme dans un plan simple, lent et magnifique.

Sur la planche, en plus de nous permettre de découvrir une réalisatrice et une actrice que l’on espère revoir au plus vite, laisse le spectateur abasourdi, se demandant s’il ne reviendrait pas d’une expérience de téléportation traumatisante dans un Tanger sous speed où les hommes sont des pigeons et les jeunes femmes des rapaces fonçant droit dans le mur. Pour se rassurer et être certain que nous venons de voir un film, et rien qu’un film, il ne nous reste qu’une chose à faire : y retourner… mais cette fois, en toute connaissance de cause!