28 juin 2013

Frances Ha ***

Jeune new-yorkaise de 27 ans, Frances (superbe Greta Gerwig) vient de rompre avec son petit ami. Bohème, paumée, elle se cherche et aspire à devenir une danseuse professionnelle.

Réalisateur : Noah Baumbach| Dans les salles du Québec le 28 juin (Métropole Films)

Frances Ha est l’un de ces jolis et précieux cadeaux que le cinéma indépendant américain sait nous offrir à l’occasion. Un cadeau livré dans un noir et blanc qui exacerbe superbement la cinéphilie de son auteur Noah Baumbach (Greenberg, The squid and The Whale). En bon élève, Baumbach assimile ses influences (de Woody Allen à Jim Jarmush, en passant par la nouvelle vague ou le Léos Carax des débuts) tout en demeurant contemporain dans son portrait mélancolico-comique de la jeunesse new-yorkaise.
Il est cependant juste de dire que Frances Ha ne présente rien de particulièrement nouveau. En effet depuis deux ans Lena Dunhan chronique dans sa série Girls les tribulations et les affres existentielles de quatre jeunes femmes new-yorkaises plongées dans le monde adulte. Les deux créations partagent beaucoup de questions similaires (l’amitié, les ambitions professionnelles, l’amour), un acteur (Adam Driver) et en même temps contiennent une différence qui n’est pas au premier abord à l’avantage de Baumbach: la qualité introspective de l’écriture de Dunhan ou l’examen de conscience récurrent de ses protagonistes. Vite pourtant, on comprend que ce refus-là chez Baumbach est justifié par la personnalité de Frances, au seuil de l’âge adulte et de ses responsabilités mais pas encore tout à fait affirmée. «Pas encore une vraie personne», de son propre aveu…
À travers une série de saynètes souvent drolatiques Baumbach retrace ses interactions ; amicales, professionnelles, amoureuses... Pour tracer une métaphore avec la danse, Frances doit trouver son rythme, son juste équilibre, dans le monde. Cette quête d’équilibre passe par une suite d’essais et d’erreurs. C’est cocasse, souvent touchant et assez justement mené. Tantôt candide, tantôt insupportable, Frances se cherche et s’égare tellement par moments qu’on craint le pire pour elle. En collant au plus près à son personnage et à sa douce folie, le film lui-même semble perdre de son rythme occasionnellement, de sa cadence comique. C’est particulièrement le cas de sa deuxième partie, plus faible.
De son caractère imprévisible, son immaturité assumée, ses contradictions, ses certitudes de plus en plus fuyantes, le film prend tout en charge et ne la laisse jamais tomber. Il s’imprime alors un mouvement fragile, entre humour et émotion, tout à fait conséquent et en raccord avec la personnalité de Frances. En posant à pied d’égalité les échecs et les triomphes fondant l’itinéraire de sa protagoniste, Baumbach ne cède rien de sa sincérité, ni de la tendresse du regard qu’il pose sur ces irrésistibles outsiders comme Frances, Florence ou encore Roger Greenberg. Et c’est tout simplement sublime !
SHARE