19 octobre 2014

FNC 2014: Pasolini ***½

Réalisateur : Abel Ferrara

Annoncé comme l’une des surprises concoctées par les organisateurs du FNC en cette fin des festivités, ce Pasolini signé Abel Ferrara s’offre aussi à nous comme un beau cadeau de consolation avec le cinéaste new-yorkais qui, cinq mois plus tôt, nous avait livré l’irregardable Welcome to New York, très certainement l’un des pires films de 2014.
Ici, le cinéaste nous propose du Ferrara pur jus, à son plus libre (séquences ré-imaginant des extraits de l’œuvre inédite de Pasolini), mélancolique, nocturne, intime, comme au temps de Go Go Tales ou 4h44 Last Day on Earth. À mille lieues du biopic factuel, Pasolini, en se focalisant sur les dernières heures de vie du célèbre cinéaste italien, privilégie plutôt une interprétation personnelle, et donc forcément ferrarienne. Ferrara n’y cherche pas à expliquer la personnalité de son héros, mais se plaît plutôt à l'imaginer sous le filtre de sa propre sensibilité. Dans une suite de scènes qui passent du plus banal (les déjeuners en famille) au fatal (l’attaque mortelle sur le bord de la plage), le cinéaste nous donne à sentir ce que cela était d’être selon lui Pasoloni et ce que cela lui coûtait au quotidien.
Pasolini chez lui rédigeant son roman expérimental, ou en train d’achever le montage de Salo ou les 120 jours de Sodome, Pasolini exprimant en entrevue sa vision sur les structures du pouvoir et la société de consommation… ou trouvant réconfort dans la compagnie d’un gigolo : le film déroule très sobrement une suite de scènes qui nous font ressentir le poids d’une existence passée dans l’urgence de vivre tout comme de créer, mais aussi dans la solitude de la fonction qu'il s'est donnée (être artiste, agir à titre d’observateur et de commentateur sur le monde).
Comme dans les récents Go Go Tales et 4h44 Last Day on Earth, il y a quelque chose ici qui tient de la confidence pour Ferrara. Par une équation métaphorique assez lisible, ce dernier trouve dans le sujet pasolinien le parfait reflet de son statut d’artiste anticonformiste et provocateur (la séquence d’ouverture à cet effet est assez exemplaire)…
À travers ces images à l’émotion contenue, Ferrara semble nous dire «  Pasolini, c’est moi ».
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