9 octobre 2015

99 Homes ***½

Après avoir perdu sa maison, un père monoparental aux abois accepte de travailler pour l'huissier qui lui a signifié son éviction et devient à son tour responsable des reprises de propriétés.

Réalisateur : Ramin Bahrani | Dans les salles du Québec le 9 octobre 2015 (VVS Films)

Suite à la crise économique de 2008 où des milliers de citoyens américains ont perdu leur résidence à cause de la cupidité des banques, il était inévitable que les stigmates laissés par ce traumatisme national fassent l’objet d’un film. Le discours social n’est pourtant pas l’apanage du cinéma américain, tant indépendant qu’hollywoodien, tout simplement parce que le niveau de réalisme qu’il requiert n’est souvent pas compatible avec les exigences d’une bonne histoire. Ramin Bahrani (At any price) contourne le problème en nous racontant une allégorie, celle d’un pacte avec le diable suivi d’une descente aux enfers à la Faust, mais située de nos jours dans une banlieue de Floride.
La scène d’ouverture où l'huissier (Michael Shannon, inquiétant), accompagné d’agents mandatés, vient signifier son éviction à Dennis (Andrew Garfield, touchant) est d’une intensité bouleversante. Le premier boulot que Dennis accepte de faire par la suite pour Carver est de nettoyer une maison insalubre, mais l’appât du gain l’amène bientôt à gravir les échelons de cette entreprise qui se repaît de la misère du pauvre monde. Moins il se salit les mains, plus sa conscience est entachée. L’histoire prend ainsi la forme d’un suspense où le personnage appréhende, comme nous, la réaction des gens chassés de leur demeure car plus la prime est élevée, plus l’éviction repose sur des détails juridiques qui échappent aux infortunés n'ayant pas les moyens se payer un bon avocat. Pendant que Dennis transgresse ses principes moraux dans le seul but de procurer un toit à son fils et à sa mère (Laura Dern, bonne comme toujours), c'est finalement le rêve américain qui est mis au banc des accusés.
Certes, la descente aux enfers du personnage principal est télégraphiée et mise essentiellement sur l’anticipation (jusqu’où ira-t-il? Quand va-t-il craquer?), mais il faut voir le film de Bahrani avant tout comme un conte moral. S'il n'est pas toujours d'une grande subtilité, 99 Homes n'en est pas moins une des critiques les plus acerbes et bouleversantes du rêve américain.
L'avis de la rédaction :

Sébastien Veilleux: ***½
Jean-Marie Lanlo: **
Martin Gignac: ***½
Olivier Maltais: ***½
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