4 décembre 2020

★★★ | Black Bear

Réalisation: Lawrence Michael Levine | Disponible au Québec en VSD à partir du 4 décembre 2020 (Pacific Northwest Pictures)
Black Bear, présenté au Sundance Film Festival, a tout du film américain indépendant qui agace l’auteur de ces lignes par son abus de “tout ce qu’il faut mettre dans un film indépendant pour avoir l’air intelligent et donc être inattaquable”: des gens qui parlent pendant le repas un verre de vin à la main (pour faire un peu “cinéma français”, c’est toujours chic), des sujets du moment (la place de la femme, ça fait “concerné par son époque”), une petite touche métafictionnelle et une construction en deux parties qui se répondent (c’est toujours de bon ton de réfléchir sur le travail de l’artiste tout en faisant une proposition narrative un peu ambitieuse).
Autant le dire tout de suite, le début a tout pour toucher sa cible (la critique américaine “sérieuse”) tout en rebutant les autres (le large spectre des laissés pour compte). Heureusement, Aubrey Plaza est là. Non seulement, sa seule présence est une réjouissance, mais en plus, à l’approche de la quarantaine, elle ose un rôle qui la fait sortir de l’adolescence (ou du statut de jeune adulte qui lui colle à la peau). Lorsque le film bascule dans la seconde partie, miroir de la première, l'actrice devient encore plus l’élément essentiel du film. Et c’est bien à ce moment-là que le spectateur grincheux et agacé par la première demi-heure (au hasard, l’auteur de ses lignes, encore lui) doit bien admettre qu’il avait fait fausse route. Non seulement la proposition narrative est à la hauteur de son ambition et permet une réflexion plutôt pertinente aussi bien sur le couple que sur le processus de création, mais surtout, Lawrence Michael Levine confirme qu’il avait fait le bon choix en confiant ce rôle à la comédienne de Safety Not Guaranteed. Dans le rôle casse-gueule de l’actrice insécure, alcoolique et trahie, elle s’en sort à merveille en évitant les pièges dans lesquels elle aurait facilement pu tomber. 
Et avec elle, c’est finalement le film, aussi cérébral que maîtrisé, qui nous convainc, malgré une mise en route un peu laborieuse.
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