10 septembre 2021

★★★ | The Card Counter

Réalisation : Paul Schrader | Dans les salles du Québec le 10 septembre 2021 (VVS Films)
Quatre ans après avoir réalisé First Reformed, considéré par beaucoup comme un de ses meilleurs films depuis bien longtemps, le scénariste de Taxi Driver nous revient avec un film qui lui permet une nouvelle fois de traiter de son thème de prédilection : la rédemption. Le très charismatique Oscar Isaac et une mise en scène épurée contribuent à générer une ambiance très froide, à l’image du personnage incarné par Isaac (un amateur de casino qui sait générer des gains sans trop attirer l’attention). Petit à petit, à l’aide de flash-back (ou forward) particulièrement maîtrisés, Schrader structure son récit et parvient à venir troubler la petite vie bien réglée de son joueur professionnel en lui faisant rencontrer presque simultanément une belle et séduisante comparse, mais surtout un jeune paumé qui viendra faire ressurgir un passé trouble et lointain (et qui ouvrira ainsi la porte d’une rédemption très schraderienne).
Souvenirs douloureux, instants de vie d’un joueur pro, interactions entre les personnages... tout cela est dans un premier temps parfaitement orchestré. De surcroît, Schrader parvient à créer un véritable télescopage entre les scènes du présent à la mise en scène très sobre et de brèves scènes du passé tournées avec une focale très courte conférant un effet distordu qui colle parfaitement à ces souvenirs douloureux. Malheureusement, lorsque le sentiment amoureux arrive dans le portrait, la mise en scène jusqu’ici (à juste titre) binaire n'arrive pas à suivre et à restituer le bris d’armure que doit subir son héros. De plus, en s’approchant de la fin, la maîtrise scénaristique dont avait fait preuve Schrader s’étiole et le cinéaste nous offre un dénouement rédempteur qui, après près de 50 ans de carrière, ressemble plus à un procédé qu’au développement d’une thématique. Le tout dernier plan, assez ridicule (alors qu’il se voudrait touchant) ne fait rien pour nous faire oublier cette faiblesse, pas plus que les chansons de Robert Levon Been, qui n’ont rien de honteuses intrinsèquement, mais qui peinent à coller à l’ambiance globale.
Voilà donc un Schrader très respectable mais également très imparfait et inégal, comme souvent chez lui. À voir tout de même pour ses qualités (dans les trois premiers quarts du film) et pour Oscar Isaac, irréprochable d’un bout à l’autre!
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