19 juillet 2019

Fantasia 2019 | ★ | Sadako

Fantasia 2019 | ★ | Sadako

Réalisé par Hideo Nakata
Hideo Nakata a indéniablement marqué le cinéma d’horreur japonais. Non seulement, il a réalisé l’excellent Dark Water, mais il est également à l'origine de Ringu, l'une des franchises les plus connues dans l'univers cinématographique horrifique (pas seulement japonais... il a d’ailleurs réalisé par le passé une suite très satisfaisante du remake américain).
Avec Sadako, film d’ouverture de la nouvelle édition de Fantasia, il nous montre non seulement que le filon est épuisé, mais que son talent s’est envolé avec!
Certes, le film est techniquement irréprochable... mais il n’y a rien d’autre à sauver. Scénario très faible multipliant les coïncidences de manière indécente, personnages transparents et caricaturaux, mise en scène incapable de faire ressentir la moindre tension, musique mal utilisée, dialogues trop souvent risibles qui ne font qu’accentuer notre sentiment de rejet envers cette œuvre clairement dispensable.
On oublie au plus vite...

17 juillet 2019

Fantasia 2019 | ★★¾ | Porno

Fantasia 2019 | ★★¾ | Porno

(Réalisé par Keola Racela)
Une petite ville américaine très chrétienne; une époque révolue où films et pellicule étaient indissociables ; des ados un peu bébêtes mais sympathiques ; un lieu secret dont la découverte va faire ressurgir l’improbable; un film caché au pouvoir maléfique; du gore rigolo; du sexe, mais pas trop... voilà les ingrédients de Porno, sympathique premier film qui se classe d'emblée dans la lignée des comédies nostalgiques maniant le second degré avec un plaisir non dissimulé.
Le genre est assez fréquent à Fantasia, mais le résultat n'est pas toujours réjouissant. Fort heureusement, le réalisateur de Porno ne tombe pas dans certains pièges. Ses clins d'œil sont maîtrisés, son second degré n’est jamais étouffant et ses personnages parviennent à assumer les clichés sans être des caricatures faciles. Surtout, Racela possède un savoir-faire technique et un humour qui rendent le film agréable à voir presque d’un bout à l’autre. Presque… car malgré quelques moments particulièrement plaisants, le film souffre de problèmes de rythme. Le scénario, qui cherche à aller dans plusieurs directions référentielles, finit par se perdre un peu en chemin au point de perdre par moments le metteur en scène. Du coup, celui-ci semble laisser filer certaines scènes pour tout donner (avec talent) sur d'autres (d'un film satanique expérimental à une scène gore testiculaire aussi drôle qu'éprouvante… pour ne citer qu'elles).
Divertissant mais très inégal, Porno a également un autre mérite : il nous permet de découvrir un réalisateur (Keola Racela) très prometteur. Nous avons hâte de le recroiser bientôt… à Fantasia ou ailleurs !

12 juillet 2019

★★★½ | The Last Black Man in San Francisco

★★★½ | The Last Black Man in San Francisco

Réalisation : Joe Talbot | Dans les salles du Québec le 12 juillet 2019 (TVA Films)
Deux hommes se promènent dans les rues de San Francisco à la recherche d'un endroit, d'une inspiration et surtout pour trouver leur place dans cette ville bien-aimée. Les deux hommes sont liés par le désir de l'un d’eux de retourner vivre dans la maison que son grand-père aurait construite en 1946. C'est sur cette trame de fond que se jouera le destin de nos héros, habités par le doute et les insécurités. Sur leur route, ils croisent des membres de la famille à la dérive, des banquiers malveillants, des gangsters au cœur sensible.
Avec ses images sublimes de la ville et de ses habitants, le premier long-métrage de Joe Talbot met en lumière les nuances de la nature humaine. Alors que les personnages sont présentés comme s'ils se trouvaient sur une scène de théâtre, le scénario prend soin de nous révéler le caractère de chacun sous plus d'une facette. La mise en scène stylisée navigue habilement sur différents tons. On passe du théâtre, au réalisme, du réel à la fantaisie. Le tout est accompagné d’une trame musicale omniprésente. La musique n'est pas utilisée dans le but de nous faire ressentir ce qui se déroule sous nos yeux. Elle est si bien intégrée au récit qu'elle est une extension de la vie intérieure des deux personnages principaux.
The Last Black in San Francisco est une quête à la fois poétique et sensible sur la nécessité de l'appartenance. Un premier long-métrage à voir absolument sur grand écran.

10 juillet 2019

★★½ | Marianne & Leonard: Words of Love (Marianne & Leonard : mots d'amour)

★★½ | Marianne & Leonard: Words of Love (Marianne & Leonard : mots d'amour)

Réalisé par Nick Broomfield | Dans les salles du Québec le 12 juillet 2019 (Entract)
Comme il l'a fait par le passé avec ses documentaires les plus célèbres, le cinéaste anglais Nick Broomfield se focalise, avec son Marianne & Leonard: Words of Love, sur une histoire d’amour entre le musicien Leonard Cohen et sa muse norvégienne Marianne Ihlen.
Le film relate la naissance de cette relation amoureuse qui commence telle une simple idylle en 1960 alors que Leonard Cohen fait la rencontre d’une jeune divorcée à Hydra, une île grecque au sud d’Athènes. Cohen y passe huit années de sa vie. Sa relation sera remplie d’amour, mais également de tumultes avec sa compagne, celle-ci peinant à accepter le mode de vie nomade de son compagnon avant leur rupture définitive. 
Avec ses nombreux documents d’archives, Broomfield réussi à nous replonger au cœur de cette période hédoniste et florissante. En revanche, après leur rupture qui inspirera à Leonard Cohen la célèbre chanson So Long, Marianne, le film emprunte les sentiers classiques du documentaire biographique en exposant la carrière de Leonard Cohen. Avec ses allers-retours dans le passé mais laissant un peu dans les oubliettes certains épisodes de la vie de sa muse, la suite comporte peu de surprises et marque un changement de registre pour Broomfield qui se montre ici plus restreint et moins enclin à nous bouleverser ou à nous provoquer.
Il y a certes quelques moments touchants comme cette lettre d’adieu de Leonard envoyée à Marianne en juillet 2016 alors que cette dernière est gravement malade: un beau moment de cinéma dans un film qui cherche d’abord et avant tout à plaire aux nombreux admirateurs du célèbre chanteur montréalais.
Se situant à mi-chemin entre le documentaire traditionnel et le portrait intimiste de deux âmes tourmentées, le film peine à trouver sa voie et ce qui aurait pu être un événement cinématographique ressemble en réalité à un rendez-vous manqué.

3 juillet 2019

★★★ | Midsommar (Midsommar : solstice d'été)

★★★ | Midsommar (Midsommar : solstice d'été)

Réalisé par Ari Aster | Dans les salles du Québec le 3 juillet 2019 (Entract)
Midsommar commence idéalement, avec une tension présente quasi instantanément grâce à une multitude de talents (mise en scène et dialogues irréprochables d'Ari Aster, interprétation délicate de Florence Pugh, photo de Pawel Pogorzelski tout aussi maitrisée que dans Hereditary, etc.). Malheureusement, lorsqu’il quitte son introduction américaine (qui reprend plusieurs éléments classiques du cinéma horrifique) pour occuper un terrain plus rarement exploré, il perd en qualité ce qu’il gagne en ambition.
En allant vers une Suède sans nuit, avec des jeunes filles blondes gambadant dans les champs avec leurs robes blanches, leurs colliers de fleurs et leurs désirs, il parvient à créer de manière convaincante un environnement qui nous semble trop idyllique pour être vrai. Cependant, il est très vite dépassé par son envie de nous faire glisser vers un cauchemar ensoleillé. On pourrait s'interroger sur ses choix graphiques (sur un sujet proche, ceux de Robin Hardy dans The Wicker Man, qui reste LE chef-d’œuvre de l’horreur folklorique, nous semblent plus efficaces). On pourrait se dire au contraire que la volonté d’opposer le fond (un culte païen de plus en plus sanglant) et la forme (une image qui est en osmose parfaite avec la beauté des étendues champêtres estivales) est d’une ambition très louable. Mais au-delà des choix formels, le vrai problème du film réside dans son absence de maitrise scénaristique. Si les dialogues de la première partie étaient irréprochables, le développement narratif de ce qui suit est beaucoup plus problématique. Certes, certains thèmes abordés sont pertinents (le rapport à l'autre, aux traditions, à la nature, etc.) mais Aster désamorce de lui-même ses sources de réflexion en faisant de son film une suite d’intentions de moins en moins plausibles. Au-delà de ses envies théoriques, il multiplie surtout les petites maladresses qui finissent par enlever à son film sa crédibilité, et donc sa force. Nous ne parlons pas ici du culte lui-même, mais d’une multitude de détails (l’usage des langues, la réaction improbable des personnages face aux événements, un usage grandissant d’une forme d’humour qui prend des allures d’arbuste cherchant à cacher une forêt de maladresses narratives, etc.) qui rendent difficile notre acceptation de sa proposition.
Avec son second film, Aster confirme ce qu’on pensait de lui après Hereditary: il possède un véritable talent de metteur en scène (ce qui justifie notre ★★★ malgré toutes nos réserves), mais aussi une confiance en lui qui le pousse à dépasser un peu trop ses propres limites (l’écriture). Pour son troisième long métrage, nous lui souhaiterons donc de garder sa foi en sa mise en scène... tout en collaborant avec un coscénariste à l'esprit critique exacerbé!
Attendons et espérons!