Réalisation: Anaïs Barbeau-Lavalette | Dans les salles du Québec depuis le 9 novembre 2022 (Sphère Films) |
Au moment de la sortie de La déesse des mouches à feu, nous écrivions le plus grand bien du film, mais également notre (bonne) surprise de voir Anaïs Barbeau-Lavalette (la cinéaste, pas l'autrice) abandonner sa fâcheuse tendance à se laisser étouffer par des sujets inattaquables et des bons sentiments. Malheureusement, le film n'était à l'évidence qu'un heureux accident de parcours, probablement lié à l'intelligence du scénario écrit par Catherine Léger (d'après Geneviève Pettersen), qui laissait à la cinéaste la possibilité de s'exprimer par l'image.
Avec Chien blanc, elle semble se souvenir de son talent de cinéaste et parvient parfois à faire naître l'émotion d'un plan, d'une image, d'une idée de mise en scène. Mais ces petits instants ne sont que des brèves réminiscences de son précédent film. Bien sûr, le principal sujet traité est important (le racisme, vu à travers la situation des Noirs dans l'Amérique des années 60) et la cinéaste se penche sur lui avec application et respect. Mais elle n'est pas la première à le faire, d'autres l'ayant fait avec plus de finesse, et surtout avec une qualité essentielle qu'elle n'a visiblement pas: faire douter ceux qui ne pensent pas comme elle.
Ce n'est pas tout. Un autre défaut majeur est cette volonté de traiter trop de thèmes à la fois. En plus du premier trop lourd à porter, Barbeau-Lavalette se penche sur deux sujets qui apparaissent comme inutiles tant ils sont bâclés: la relation Romain Gary / Jean Seberg (qui avait pourtant tout pour être passionnante) et l'histoire de ce chien blanc, adorable avec les Blancs mais dressé pour s'attaquer aux Noirs (sujet tout aussi passionnant mais encore plus bâclé que le précédent). Dans son adaptation de 1982 (White Dog), Fuller avait fait un choix très différent et beaucoup plus judicieux, malgré le caractère mineur de son film.
Au final, la cinéaste nous livre donc trois films en un... sans en réussir un seul. Heureusement, son talent parvient à sauver l'ensemble par intermittences grâce à quelques propositions de mise en scène. Mais c'est bien trop peu par rapport à toutes ces attentes déçues.