3 juillet 2019

★★★ | Midsommar (Midsommar : solstice d'été)

Réalisé par Ari Aster | Dans les salles du Québec le 3 juillet 2019 (Entract)
Midsommar commence idéalement, avec une tension présente quasi instantanément grâce à une multitude de talents (mise en scène et dialogues irréprochables d'Ari Aster, interprétation délicate de Florence Pugh, photo de Pawel Pogorzelski tout aussi maitrisée que dans Hereditary, etc.). Malheureusement, lorsqu’il quitte son introduction américaine (qui reprend plusieurs éléments classiques du cinéma horrifique) pour occuper un terrain plus rarement exploré, il perd en qualité ce qu’il gagne en ambition.
En allant vers une Suède sans nuit, avec des jeunes filles blondes gambadant dans les champs avec leurs robes blanches, leurs colliers de fleurs et leurs désirs, il parvient à créer de manière convaincante un environnement qui nous semble trop idyllique pour être vrai. Cependant, il est très vite dépassé par son envie de nous faire glisser vers un cauchemar ensoleillé. On pourrait s'interroger sur ses choix graphiques (sur un sujet proche, ceux de Robin Hardy dans The Wicker Man, qui reste LE chef-d’œuvre de l’horreur folklorique, nous semblent plus efficaces). On pourrait se dire au contraire que la volonté d’opposer le fond (un culte païen de plus en plus sanglant) et la forme (une image qui est en osmose parfaite avec la beauté des étendues champêtres estivales) est d’une ambition très louable. Mais au-delà des choix formels, le vrai problème du film réside dans son absence de maitrise scénaristique. Si les dialogues de la première partie étaient irréprochables, le développement narratif de ce qui suit est beaucoup plus problématique. Certes, certains thèmes abordés sont pertinents (le rapport à l'autre, aux traditions, à la nature, etc.) mais Aster désamorce de lui-même ses sources de réflexion en faisant de son film une suite d’intentions de moins en moins plausibles. Au-delà de ses envies théoriques, il multiplie surtout les petites maladresses qui finissent par enlever à son film sa crédibilité, et donc sa force. Nous ne parlons pas ici du culte lui-même, mais d’une multitude de détails (l’usage des langues, la réaction improbable des personnages face aux événements, un usage grandissant d’une forme d’humour qui prend des allures d’arbuste cherchant à cacher une forêt de maladresses narratives, etc.) qui rendent difficile notre acceptation de sa proposition.
Avec son second film, Aster confirme ce qu’on pensait de lui après Hereditary: il possède un véritable talent de metteur en scène (ce qui justifie notre ★★★ malgré toutes nos réserves), mais aussi une confiance en lui qui le pousse à dépasser un peu trop ses propres limites (l’écriture). Pour son troisième long métrage, nous lui souhaiterons donc de garder sa foi en sa mise en scène... tout en collaborant avec un coscénariste à l'esprit critique exacerbé!
Attendons et espérons!
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