18 mai 2012

Toucher le ciel **

En 2009, le milliardaire (et fondateur du Cirque du Soleil) Guy Laliberté s'apprête à réaliser un rêve d’enfant: passer un séjour dans l'espace à bord de la station spatiale internationale. Adrian Wills a suivi le futur astronaute durant les quatre mois et demi d'entraînement avant de lui confier une caméra en lui demandant de ramener des images inédites de son voyage en apesanteur.

Réalisateur: Adrian Wills | Dans les salles du Québec le 18 mai 2012 (Les Films Séville)

À l’évidence, le film possède un problème majeur pour un documentaire: le sujet annoncé manque totalement d’intérêt. Si la volonté du cinéaste et de son commanditaire (Guy Laliberté) avait été de réaliser un film sur un homme voyant son rêve d’enfant se concrétiser, il aurait pu être touchant. Malheureusement, jamais nous ne parvenons à ressentir ce sentiment de joie lié à la concrétisation d’un vieux rêve impossible (pour le commun des mortels). À la place, le film semble vouloir ressembler à un mélange de film de vacances et à un outil promotionnel pour Laliberté, en mettant en avant sa démarche “artistique” (lire un poème dans l’espace avec un nez de clown sur le nez... à côté du Cirque du soleil, c’est quand même artistiquement un peu faible!). Peut-être conscient de cette faiblesse, Guy Laliberté endosse aussi l’habit du militant écologique souhaitant porter haut et fort un message (fort louable) au nom de son association One Drop (probablement fort respectable), comme si le but du voyage était de réaliser une “mission sociale et poétique dans l’espace” (l’expression est extraite du site internet de l’association). Cela nous semble là encore un peu juste. D’autant plus qu’avec les 50 millions de dollars qu’a coûté le voyage, il aurait pu promouvoir l’association de manière plus efficace. Mais attention, nous ne reprochons pas à Laliberté le coût du voyage. Il est milliardaire et a les moyens de s’offrir l’impossible, cela ne nous pose aucun problème. Cependant, il ne faut pas non plus nous faire prendre des vessies pour des lanternes, et sa motivation première est probablement plus son rêve d’enfant devenu réalité que sa “mission”. Pourquoi vouloir le nier! À force de regarder Laliberté sans trop savoir quoi en faire et quelle image en donner, le film se perd et oublie l’enfant devenu homme pour nous laisser l’image d’un mec riche mais hyper cool (qui est pote avec U2, des mecs riches mais hyper cool aussi) et qui se baigne dans la piscine de sa villa d’Ibiza avant d’aller dans l’espace pour nous parler du gaspillage des ressources en eau. Cherchez l’erreur!
Fort heureusement, Adrian Wills trouve le moyen de s’extirper de ce bourbier promotionnel en allant au-delà. Son regard se porte de manière intéressante sur l'entraînement indispensable à ce genre de voyage (il est vrai indissociable du sujet de base), mais aussi sur l’aspect financier (les “touristes” servent à financer les programmes) et surtout sur les anciens cosmonautes ou astronautes. Leurs témoignages, où se mélange le plus naturellement du monde la science, le rêve, la poésie et la philosophie, sont bien plus intéressants que les états d’âmes de Guy Laliberté...
On aurait voulu que cette partie soit plus développée. Malheureusement, Adrian Wills avait une commande: filmer la préparation des vacances spatiale d’un clown. Il l’a respectée...
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