18 avril 2014

Une autre vie ***½

Une pianiste (Jasmine Trinca) s’engage dans une relation avec un installeur d’alarmes (JoeyStarr).

Réalisateur : Emmanuel Mouret | Dans les salles du Québec le 18 avril 2014 (K-Films Amérique)

Fils spirituel de Woody Allen et d’Éric Rohmer, Emmanuel Mouret mène une carrière envieuse. Le cinéaste français a véritablement trouvé sa voix avec Changement d’adresse où il cultivait un humour qui lui est propre. Qu’il soit doux-amer (Un baiser s’il vous plaît), plus burlesque (Fais-moi plaisir!) ou tendre (L’art d’aimer), ses dialogues fondent tout simplement dans la bouche, charmant par leur véracité et leur honnêteté.
Le réalisateur se permet deux métamorphoses majeures au sein d’Une autre vie. Il embrasse tout d’abord le mélodrame pour adultes, celui qui aurait pu sonner faux et kitch mais qui au contraire séduit par sa justesse et ses élans de cœur. Puis à mi-chemin, porté par une musique particulièrement émotive, il dérive lentement mais sûrement vers un suspense que n’aurait pas renié le Hitchcock de Vertigo.
Bien sûr, on reconnaît son style unique. Il apparaît dans l’hésitation de ses personnages, dans ses âmes qui se mettent à nu et dans ces désillusions, où l’amour n’a pas toujours le dernier mot. Débutant comme une simple histoire d’amour interdite entre deux individus de classes sociales différentes (on pense au très beau Mademoiselle Chambon de Stéphane Brizé), le récit se mute vers une universalité des sentiments qui évoque par la bande quelques classiques de François Truffaut.
La mise en scène parsemée d’ellipses brouille volontairement les cartes, déconcertant par moments. Les comédiens sont d’une justesse inouïe et se révèlent sous des angles nouveaux. Le film confirme surtout le grand talent de la magnifique Jasmine Trinca, découverte en adolescente dans le bouleversant La chambre du fils de Nanni Moretti.
Très jolie étude de caractères, Une autre vie ne fera peut-être pas de nouveaux adeptes au sein du cinéma d’Emmanuel Mourret. Il confirme pourtant son très grand talent pour des sujets romanesques, où les mots transpercent les corps pour le meilleur et pour le pire.
En résulte un opus de grande classe!
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