30 septembre 2014

Livre: Film Noir. 100 All-Time Favorites (édition française)

(Paul Duncan et Jürgen Müller; Taschen; 688 pages)

Tenir entre les mains le nouveau livre des éditions Taschen consacré au film noir procure d’emblée un plaisir immense au lecteur cinéphile: près de 700 pages imprimées sur papier glacé, en grand format et richement illustrées en font un livre que l’on a envie de dévorer.
Chaque page comporte, en plus des textes consacrés à chaque film, de nombreuses photos, mais aussi des encadrés (de courts textes sur des acteurs, directeurs photo, réalisateurs ou thèmes divers liés au film noirs), des légendes très détaillées et des citations mises en exergue. Ainsi, il semble convenir à deux types de lectures: d’une part, une lecture en diagonale consacrée aux photos et aux courts textes, et d’autre part une lecture plus approfondie consacrée aux textes de fond (vouloir cumuler les deux représente vite un exercice périlleux en raison d’une mise en page qui deviendra alors un peu trop éclatée!).
Au delà de la qualité globale de l’objet, certains point faibles viennent cependant atténuer notre enthousiasme: l’écriture en blanc sur fond noir n’offre pas le plus grand confort de lecture, les textes ne sont parfois pas suffisamment analytiques, et nous regrettons que les illustrations de certains films en couleur (c’est surtout le cas pour les films les plus anciens) soient reproduites en noir et blanc (l’exemple le plus problématique est From Her to Heaven!).
Ces petits reproches se font cependant assez rapidement oublier, en partie grâce à un choix de films assez pertinent. Sans chercher à surprendre à tout prix, les auteurs n’hésitent en effet pas à sortir des limites classiques du film noir, s’extirpant en dehors des années 40 et 50 et s’aventurant ailleurs qu’aux États-Unis. La présence dans l’ouvrage de films comme Le Cabinet du docteur Caligari ou Quai des Brumes est d’ailleurs justifiée dans les trois textes d’introduction dont nous conseillons fortement la lecture.
Le premier, écrit par Paul Schrader en 1971, est une tentative de définition du film noir, intégrant ses caractéristiques, ses sous-genre, son évolution. Cet avant-goût de grande qualité devrait mettre tout de suite dans le bain les non-initiés au genre.
Le second texte (Jürgen Müller et Jörn Hetebrügge) est une longue étude sur la mise en scène de La Dame de Shanghai (Orson Welles). L’analyse prend pour point de départ une phrase extraite du texte précédent : dans le film noir, «le comment [la forme] est toujours plus importante que le quoi [le fond]».
Le troisième texte, tout aussi intéressant, est une introduction au néo-noir (Douglas Keesey), sous-genre qui occupera par la suite une place importante de l’ouvrage.
Vous l’aurez compris, cet ouvrage somptueux, malgré de petites réserves, devrait pleinement satisfaire aussi bien les cinéphiles pointus que les néophytes à la recherche de listes de films à découvrir… cela en fait indéniablement un ouvrage indispensable!
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