Le Printemps arabe vu de l’intérieur, en l’Égypte... des manifestations contre le régime de Moubarak à la chute de Mohamed Morsi.
Réalisateur : Jehane Noujaim | Dans les salles du Québec le 17 janvier 2014 (Le Cinéma du Parc)
On oublie trop souvent en raison des coûts et de la lourdeur de la production que le cinéma (et surtout le documentaire) peut être un art de l’instantanéité: il se passe quelque chose, le cinéaste a un flash, sort sa caméra et filme. Dans 99% du temps, cette lubie ne sortira probablement jamais du disque dur. Mais le contraire peut se produire lorsque l’Histoire est en mouvement.
C’est justement le cas pour The Square, important essai de Jehane Noujaim sur l’Égypte de janvier 2011 à juillet 2013. Il y a des manifestations parfois violentes, une révolution au tournant, un désir de démocratie, des injustices à la tonne, des espoirs qui ne sont pas formulés et un retour des gens dans la rue. La joute politique, complexe mais bien expliquée, passe par différentes formes de régimes (du dictateur, de l’armée, de l’élu entre bonnet blanc et blanc bonnet, etc.) et laisse un goût amer dans la bouche.
C’est toutefois la population qui se trouve au cœur des enjeux et qui risque sa vie pour modifier les choses. Tel un film choral, The Square suit quelques destins sur le fil du rasoir, naviguant entre les classes sociales ou religieuses, et se garde bien d’établir un discours manichéen sur la situation. La réalisation réglée au quart de tour développe un suspense souvent insoutenable et, malgré quelques lourdeurs et répétitions, s’avère assez impressionnante.
Favori lors de la prochaine cérémonie des Oscars (la compétition est forte avec les très bons Dirty Wars, Cutie and the Boxer et The Act of Killing), The Square ouvre la voie à de très beaux documentaires que nous découvrirons ces prochaines semaines (dont L’image manquante et Visitors).
Riche, nécessaire et fascinant, The Square décrit parfaitement son époque, et fera date!