7 février 2014

L’image manquante ***½

À partir d’images d’archives et de reconstitutions réalisées avec des figurines en argile, Rithy Panh nous fait vivre les atrocités commises par les Khmers rouges entre 1975 et 1979.

Réalisateur: Rithy Panh | Dans les salles du Québec le 7 février 2014 (Funfilm Distribution)

Rithy Panh, qui a connu enfant l’enfer des camps Khmers rouges avant d’émigrer en France (il a étudié le cinéma à l’HIDEC), est souvent revenu sur le passé qui a meurtri son pays. L’image manquante, véritable voyage intime dans les souvenirs du cinéaste, devient le point de départ à un témoignage sur l’époque. En complément des images d’archives, Rithy Panh a la bonne idée de reconstituer les souvenirs du passé à l’aide de figurines en terre. Le procédé nous place régulièrement entre un art naïf qui rappelle la période de l’enfance (le réalisateur a intégré les camps lorsqu’il était enfant) et un témoignage qui se voudrait plus réaliste (des images d’archives… qui sont en fait les images du régime). En passant de l’une à l’autre, il fait se confronter deux souvenirs (l’intime d’une part, et ce que les dirigeants de l’époque auraient voulu voir devenir l’histoire officielle) qui finissent par livrer un témoignage personnel qui prétend davantage refléter la difficulté du quotidien que l’ampleur du génocide commis par les Khmers rouges.
La narration lente, les silences et le refus du spectaculaire témoignent d’un certain apaisement, d’un refus de la haine, d’une envie d’exprimer et de comprendre plus que de condamner, ce qui donne encore plus de force à ses propos. Les constats que tire Rithy Panh sur l’aveuglement idéologique, la manipulation, la soumission ou sur le rôle de l’image n’en sont que plus forts car ils semblent le fruit d’une longue réflexion plus que le résultat d’une haine contre ses tortionnaires ressassée depuis 35 ans.
Même si le film est très personnel, c’est avant tout par sa capacité à parler de sujets universels et toujours d’actualité que L’image manquante nous touche tant… et qu’il est à voir absolument.
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