27 mars 2015

White God (Fehér isten) ***½

Une adolescente part à la recherche de son chien que son père a abandonné.

Réalisateur : Kornel Mundruczo | Dans les salles du Québec le 27 mars 2015 (VSC)

La scène d’introduction de White God est saisissante. Une fille roule dans une ville déserte, avant de se faire poursuivre par une multitude de chiens. Tout d’un coup, on retient son souffle… Facilement une des plus belles entrées en matière vues au cinéma depuis belle lurette.
La suite se découpe en trois actes presque distincts. Le premier emprunte à Walt Disney, à cette amitié incroyable entre une jeune âme et son meilleur ami à quatre pattes. Leur relation ne sent jamais les clichés ou les bons sentiments tant le réalisateur fait confiance à ses personnages, à son héroïne Zsofia Psotta qui tend à être sans jamais jouer et à ces chiens trop parfaits – sans effets spéciaux, par-dessus le marché - qui véhiculent toutes les émotions de la planète. Le conte est pourtant extrêmement réaliste et ses quelques détails naturalistes risquent de nouer le cœur et lever l’estomac.
Peu à peu, à l’aide d’un ingénieux montage parallèle, les protagonistes entrent dans la vraie vie... un passage vers l’âge adulte qui laisse des marques physiques, psychologiques et morales. Avec une séquence de danse digne de Kechiche ou Sciamma et le pauvre bâtard poilu qui tombe entre de mauvaises mains et le tour est joué: leurs destins avancent, imperturbables, jusqu’à la conclusion qui n’épargne rien ni personne.
La dernière ligne droite rappelle les séries B horrifiques et amusantes. Ce changement de ton abrupt et pas toujours au point a le mérite de surprendre et de sortir des conventions. Prêchant un peu par excès, le cinéaste hongrois - eh oui, ce cinéma existe en dehors de Bela Tarr - embrasse alors le drame social, où il est possible de remplacer ce soulèvement de chiens par n’importe quoi (des pauvres? des étrangers? en cette époque de la peur de l’Autre, tout est possible). Le scénario a le dos large et ne fait pas dans la subtilité, mais il a le mérite d’être clair et limpide.
Sans s’inscrire parmi les plus grandes œuvres de l’année, White God demeure tout de même un récit édifiant et très intéressant sur les laissés-pour-compte de la société. Ce mini tour de force fait découvrir le talent certain de Kornel Mundruczo (dont les précédents Johanna, Delta et Tender Son ont laissé peu de traces ici) et permet de mieux comprendre le Prix Un certain regard gagné au dernier Festival de Cannes.
Pour une fois que l’aventure sort de l’ordinaire!
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