10 avril 2015

L'extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet  (The Young and Prodigious T.S. Spivet) ***½

Après avoir remporté un prix pour son invention, un jeune prodige qui se sent incompris par sa famille s’enfuit de la maison et traverse le pays afin d’être honoré par ses pairs.

Réalisateur : Jean-Pierre Jeunet | Dans les salles du Québec le 10 avril 2015 (Les films Séville)

La touche particulière de Jean-Pierre Jeunet tient à un fragile équilibre entre débordement d’imagination et vérité des sentiments, une signature qui ne se prête pas à tous les genres (Un long dimanche de fiançailles) ni à toutes les sauces (Alien, la résurrection). Pour son deuxième long-métrage tourné en anglais (coproduction France-Canada-Australie), le réalisateur de Delicatessen et de La cité des enfants perdus renoue avec ces fables fantaisistes dont il a le secret. Tour à tour western postmoderne, road movie ferroviaire et parodie des médias, le film multiplie les trouvailles visuelles et les moments tendres. Si l’imaginaire de T.S. Spivet s’inspire volontiers de Leonardo Da Vinci, ses préoccupations n’en restent pas moins celles d’un enfant et Jeunet trouve le bon dosage pour mettre en image le génie du gamin sans le dénaturer (équilibre qui manquait cruellement à Micmacs à tire-larigots).
Le film n’est cependant pas exempt de défauts. Comme c’est souvent le cas dans les feel good movie, les anecdotes charmantes prennent le pas sur les enjeux dramatiques. Ainsi, on regrette que la fugue de l’enfant ne soit pas mieux exploitée, donnant parfois l’impression que le réalisateur néglige les problèmes soulevés par son histoire. Les obstacles sont peu nombreux et le jeune public, à qui le film s’adresse en priorité, risque d’y trouver des longueurs pour cette raison.
Malgré ces quelques réserves, le film dépasse le simple voyage dans l’imaginaire. Il aborde aussi des thèmes plus difficiles tels que le sentiment d’abandon et la mort d’un proche (dont le garçon se sent responsable). Dans le rôle principal, le jeune Kyle Catlett insuffle à son personnage toute la crédibilité et la candeur nécessaire. Bien sûr, les bons sentiments foisonnent et la fin, un peu trop hollywoodienne, semble précipitée. Malgré cela, L'Extravagant Voyage du jeune et prodigieux T. S. Spivet est une œuvre généreuse et visuellement impeccable. Probablement le meilleur film de son réalisateur depuis Le fabuleux destin d’Amélie Poulain.
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