8 mai 2015

Kurt Cobain: Montage of Heck ***

L’oeuvre et la vie de Kurt Cobain racontées par le réalisateur de The Kid Stays in the Picture, Brett Morgen.

Réalisateur : Brett Morgen| Dans les salles du Québec le 08 Mai (Cinéma du Parc)

Il y a bien eu par le passé quelques tentatives de s’approprier l’histoire de Kurt Cobain (Kurt&Courtney, Kurt Cobain About a Son ou encore Last Days de Van Sant), mais aucune d’elles ne rivalise avec le degré d’intimité et d’émotion déployé dans le documentaire de Brett Morgen. Le geste ici est empreint d’une admiration sans faille. Il est d’ailleurs assez facile en regardant le film de comprendre pourquoi le clan et la famille de Cobain lui ont accordé un accès jusque-là inédit dans ses archives personnelles (journaux intimes, dessins, vidéos d’enfance, enregistrements audio..).
Prenant son titre d’un vieil enregistrement audio assez insolite dans lequel un jeune Cobain s’amusait à bricoler des sonorités de toutes sortes, le film (le terme patchwork filmique serait plus approprié) détaille via séquences animées, extraits de journal et interviews de ses proches, tous les passages d’une existence chaotique et tourmentée (enfance, tentatives de suicide, création de son groupe, sa célébrité..). Alternant entre entrevues plus classiques et une veine plus expérimentale (les passages en animation), Morgen illustre remarquablement toute la détresse, le mal-être d’un homme fuyant sa propre célébrité, et dont le seul bonheur résidait dans sa passion pour la musique, son amour toxique pour Courtney Love (l’autre beau et complexe personnage du film) et les joies éphémères de la paternité. Son désir de la mort n’est pourtant jamais trop loin (ces « go kill yourself » écrits à répétition dans son journal).
Morgen choisit de passer furtivement sur certains détails (le suicide, l’addiction aux drogues), néanmoins il laisse à Love le soin de raconter leurs derniers mois ensemble. Le film alors se fait particulièrement poignant, sans ne jamais sombrer dans le sentimentalisme. À d’autres moments, Montage of Heck est insupportable, notamment dans son usage répétitif des vidéos intimes du couple amoureux fou, isolé dans sa maison, défoncé. Mais si cette envie de s’attarder trop inutilement sur certains passages finit par agacer, elle est aussi à voir comme le geste touchant d’un artiste trop passionné par son sujet, si désireux d’en exhumer la mémoire qu’il ne veut rien lâcher….
Sans être le grand film annoncé, Montage of Heck demeure malgré ses imperfections très certainement l’un des documentaires musicaux les plus passionnants vus dans la dernière décennie.
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