10 juillet 2015

Amy ***½

La vie et la carrière de la chanteuse britannique Amy Winehouse racontées par le réalisateur de Senna, Asif Kapadia.

Réalisateur: Asif Kapadia | Dans les salles du Québec le 10 Juillet (Métropole)

Amy est un biopic documentaire fascinant, émouvant et troublant. En ce sens-là, il est parfaitement et à 100% à l’image de son sujet, la chanteuse Amy Winehouse. Tout chez elle (son enfance triste, son adolescence dépressive, son look, son talent, son aura sauvage, ses excès, sa célébrité sur-médiatisée) pressait le cinéma à s’y intéresser un jour. Aujourd’hui, c’est chose faite avec Amy. Et telle qu’orchestrée par Asif Kapadia, cette rencontre des deux se révèle tout simplement spectaculaire.
Dans un dispositif évoquant le travail de Tom DiCillo (When You’re Strange), ou encore plus récemment celui de Brett Morgen (Montage of Heck), Asif Kapadia a construit son film uniquement à partir d’images et d’archives mettant en scène Winehouse. Quelle que soit leur origine (cellulaire, vidéos de famille, spectacles), elles produisent un sentiment de proximité et d’intimité immédiat. Souvent inédites, ces images retracent toutes les périodes de sa vie (ses sorties adolescentes, ses auditions, sa lune de miel, sa solitude de la fin...) et permettent comme jamais auparavant de mieux comprendre la personnalité complexe, fragile et sensible de l’artiste qu’était Winehouse. En témoigne d’ailleurs cette scène inoubliable partagée avec Tony Bennett, et dans laquelle pour un instant elle se réinvente en la chanteuse jazz géante qu’elle aurait pu devenir.
Parallèlement à cette riche matière visuelle, Kapadia a enregistré les témoignages de personnes qui ont connu Winehouse pour les incorporer dans la bande son de son film. Si l’inclusion de certains passages ou le recours trop appuyé de quelques témoignages en voix-off tendent plus vers le reportage télévisuel que vers un authentique projet cinématographique, il n’en demeure pas moins qu’Amy pose une réflexion pertinente sur la dérive des médias, de l’information instantanée et sur les dangers de la célébrité.
La question n’est jamais posée explicitement, mais elle sous-tend tout le film, particulièrement dans sa dernière partie : Qu’est ce qui a tué Amy Winehouse? Cette fuite vers les drogues et l’alcool de laquelle elle n’a jamais pu revenir n’était-elle pas au final une conséquence directe de l’attention insensible de ses proches et des exigences butées de son entourage professionnel? Ou encore du voyeurisme écœurant des médias toujours prêts à flasher dans ses moments les plus intimes et personnels… On se dit que dans des meilleures conditions, la tragédie aurait pu être évitée, mais cette fois malheureusement le happy-end n’aura pas eu lieu.
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