26 juillet 2015

Livre: Les films à voir cette semaine. Stratégies de la critique de cinéma

(Sous la direction de Laurent Jullier; L’Harmattan; 256 pages)

Le critique de cinéma doit-il être professeur ou journaliste?
Que doit-il privilégier: la raison ou l'intuition?
Doit-il rechercher l’analyse scientifique ou l’expression artistique (en considérant que le texte vaut plus que son contenu).
Est-il un créateur, un médiateur (le passeur de Daney) ou un simple récepteur?
Afin de tenter de répondre à ces questions (et à bien d’autres) concernant la critique de cinéma, les différents intervenants de cet ouvrage proposent des textes organisés en quatre parties.
La première, plus historique, permet notamment à Valérie Vignaux d'analyser l’évolution de l’approche de George Sadoul (Georges Sadoul aux Lettres Françaises. Une critique de la «contemporanéité»?) ou à Jean-Albert Bron de revenir sur le rapport qu’entretenait la presse intellectuelle française des années 50 / 60 avec le cinéma (Les intellectuels français face au cinéma (1950-1968). De quelques errements significatifs dans la réception des films de rupture européens).
La seconde partie quitte la France pour s’intéresser à d’autres pays. Parmi les textes les plus intéressants, nous avons retenu celui de Julia Hedström, qui se livre à une véritable réflexion sur la critique en comparant les réceptions française et américaine de La nuit des mort-vivants de Romero (Interprétation et frontières nationales. L’exemple de La Nuit des mortsvivants) et celui d’Anne Boutang, qui se penche sur le cas Roger Ebert («Pour ce qu’il est»: Roger Ebert, 1942-2013).
La troisième partie retourne dans l'Hexagone et se consacre aux critiques au travail. La relative faiblesse de ce segment est largement compensée par une quatrième partie passionnante, composée de trois entrevues avec des représentants de la critique française. Celle de Jean-Loup Bourget, critique à Positif (L’honnêteté et l’intuition, effectuée par Cécile Martin et Alissa Wenz) livre un regard intéressant sur son approche du travail de critique. Pour sa part, celle consacrée à Stéphane Delorme, rédacteur en chef des Cahiers du Cinéma (La critique comme acte de foi, effectuée par Mélanie Boissoneau et Lucie Mérijeau) est d’une très grande qualité. Nous seulement l'interviewé nous fait part de manière sincère et intelligente de sa conception d'une revue de cinéma, mais en plus, les deux intervieweuses mènent leur entretien avec dextérité, en posant des questions pertinentes de manière particulièrement fluide!
Au final, cet ouvrage collectif porte un regard passionnant sur le travail de critique, de manière très complémentaire, en faisant bien ressortir la multitude des conceptions possibles de cette activité.
Un ouvrage indispensable pour tous ceux qui s’intéressent au sujet… ou tout simplement au cinéma!
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