7 octobre 2016

The Birth of a Nation **

En 1861, en Virginie, l’esclave Nat Turner conduit une révolte qui se termine dans un bain de sang.

Réalisateur: Nate Parker | Dans les salles du Québec le 7 octobre 2016 (20th Century Fox)

Le moins qu'on puisse dire est que cet anti Birth of a Nation (version D.W. Griffith) aurait mérité des personnages moins manichéens. Certes, certains protagonistes blancs sont moins mauvais que d'autres, mais face à ces derniers, les esclaves sont représentés avec la volonté aussi évidente que malhonnête de susciter artificiellement la sympathie et la pitié. Devant les atrocités abjectes que l’on a fait subir à ces hommes, femmes et enfants durant cette triste période de l’histoire des États-unis, nous ne pouvons que déplorer la facilité avec laquelle le réalisateur les dépeint. Un tel simplisme dans la représentation des personnages n’était pas nécessaire.
Malheureusement, ces reproches ne sont pas les seuls irritants. Les choses basculent en effet lorsque la révolte des esclaves apparaît. Nate Parker aborde pourtant un point intéressant en insistant sur le rôle de la religion, utilisée pour asseoir une domination (l'esclave qui connaît la Bible est manipulé par les blancs pour demeurer soumis) avant d'être mal interprétée pour justifier la révolte. Ce discours très actuel, à une époque où Dieu est utilisé aussi bien par les conservateurs les plus rétrogrades que par les fous de Dieu qui perpètrent des tueries en prétendant agir en son nom, aurait pu être très pertinent. Pourtant, Nate Parker ne semble pas condamner la manipulation biblique: il fait au contraire de son héros un martyr. Mais suffit-il de se révolter contre l'oppression pour être héroïque? La révolte autorise-t-elle toutes les violences ? Jamais Parker ne semble vouloir se poser ces questions pourtant essentielles, d’autant plus actuelles que l’Amérique connaît de nouvelles tensions raciales.
Le film de Parker ressemble donc un peu trop à un appel à la révolte qui pourrait se terminer dans le même bain de sang que celui décrit dans le film… à moins qu’il ne soit un constat d’échec envers ce grand pays, toujours aussi incapable de gérer les problèmes par le biais de solutions politiques. Malheureusement, il nous est difficile de retenir cette dernière interprétation en raison du manque de recul évident dont fait preuve Nate Parker. Le résultat se contentera donc d'être indigeste.
L'avis de la rédaction :

Jean-Marie Lanlo: **
Martin Gignac: ***
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