17 septembre 2018

FCVQ 2018 | The Green Fog

Un film de Guy Maddin, Evan Johnson et Galen Johnson
Hier soir, le Festival de cinéma de la ville de Québec continuait à témoigner de son éclectisme en projetant The Green Fog, qui faisait passer le reste de la filmographie de Guy Maddin pour du cinéma mainstream.
À partir d’extraits de centaines de films ou séries se déroulant à San Francisco, Maddin et ses acolytes recréent à leur façon le Vertigo d’Alfred Hitchcock (film qu’il faut avoir déjà vu avant de visionner The Green Fog, sous peine d’être totalement perdu). Le résultat laisse des sentiments multiples et contradictoires, un peu à l’image du film lui-même, qui nous pousse par moments à nous remémorer le film qui lui sert de point de départ, mais qui nous perd également parfois avec des choix abscons. C’est justement un des points forts du film: montrer à quels points les traces que peut laisser une oeuvre dans l’imaginaire peut être différent d’une personne à l'autre. Ainsi, nous cherchons parfois en vain à retrouver le fantôme de certaines scènes de Vertigo. Inversement, à d'autres moments, nous ne comprenons pas les orientations que prend la relecture Maddinienne.
Finalement, avec The Green Fog, Vertigo change de statut, et passe de l’état de film à celui de somme de souvenirs personnels. En invitant les spectateurs à voir leur film, les cinéastes leur proposent de partir à la recherche d’un film parfait (Vertigo), fantasmé, qu’ils essaieront de retrouver malgré une forme différente. Ce n’est pas tant The Green Fog qui est une réinterprétation de Vertigo, mais  plutôt l’expérience de visionnement elle-même qui met le spectateur à la place de Scottie / James Stewart essayant de recréer la femme qu’il a jadis aimée.
Si cet aspect peut paraître le plus intéressant (et troublant) du film, il n’est pas le seul. The Green Fog comporte de surcroît quelques éléments qui pourront également faire réagir ceux qui n’ont jamais vu Vertigo. Là encore, la forme choisie, proche du patchwork a priori brouillon, laissera à chacun la liberté de s’interroger sur tel ou tel aspect, véritables points de départ à une réflexion sur le langage cinématographique. En ce qui nous concerne, nous retiendrons particulièrement l’importance de la musique (signée Jacob Garchik et qui revisite à merveille celle de Bernard Herrmann) utilisée comme lien entre des plans hétéroclites, et véritable fil conducteur permettant au spectateur de ne pas décrocher d’un développement narratif chaotique.
D’autres éléments sont tout aussi passionnants (les scènes de dialogues dans lesquelles les cinéastes ont justement coupé les dialogues, pour ne conserver que les mimiques ponctuant habituellement les conversations), mais il y en a beaucoup d’autres… à découvrir au fil des visionnements. À condition d’avoir la force (ou le courage... il en faut quand même un peu) de se replonger dans ce bien étrange brouillard vert peuplé des fantômes parfois fugaces de nos souvenirs cinéphiles!
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