16 avril 2021

★★★ | Les choses qu'on dit, les choses qu'on fait

Réalisateur: Emmanuel Mouret | Dans les salles du Québec le 16 avril 2021 (K-Films)

Après le très réussi Mademoiselle de Joncquières, le cinéaste français Emmanuel Mouret, le petit maître des jeux de l'amour et du hasard, nous revient avec un nouveau film auréolé d’une prestigieuse aura aussi bien de la part du public exigeant (lauréat du Prix des auditeurs du Masque et la Plume) que de la critique (Prix du Syndicat français de la critique de cinéma).
Le film est il est vrai empli de qualités, notamment au niveau scénaristique. Pour restituer au mieux la complexité des rapports amoureux, Mouret nous propose une galerie de portraits et de couples qui se font et se défont. Ses multiples ruptures temporelles sont parfaitement maîtrisées, la palette du désir est très riche, et le cinéaste/scénariste a de surcroît la bonne idée d’éviter d’inclure dans son récit des personnalités toxiques. Il montre ainsi que même entre personnes respectueuses, la valse des sentiments est une danse particulièrement complexe. Malheureusement, cette réussite théorique possède ses failles. À force de multiplier histoires et personnages, Mouret finit par les transformer en cas d’école au service de la thèse qu’il défend. Même si les qualités de l’écriture sont indéniables, on peut facilement survoler les véritables sentiments ressentis par les protagonistes sans en être particulièrement affecté… du moins jusqu’aux deux dernières courtes scènes du film. Le temps d’une séparation sur un quai de gare et d’une rencontre fortuite autour de sapins de Noël, Mouret laisse alors la parole aux images, aux corps, aux regards, aux regrets. En quelques plans, le scénariste devient cinéaste en même temps que la théorie se transforme en ressenti, en fragilité, en doute… en émotion pure.
Rien que pour ces quelques minutes, il faut voir Les choses qu'on dit, les choses qu'on fait. On aurait même presque envie de revoir tous les films de Mouret de manière chronologique pour constater la passionnante évolution de son cinéma, qui est passé progressivement et intelligemment d’héritier d’Étaix à héritier de Truffaut!
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