16 février 2024

★★★ ½ | Io Capitano (Moi Capitaine)

Réalisateur : Matteo Garrone| Dans les salles du Québec le 16 février 2024 (Immina Films)
Avec Io Capitano, Matteo Garrone quitte l’Italie de Dogman  ou la fantaisie de Il Racconto dei racconti pour nous entraîner au Sénégal, aux côtés de deux cousins qui rêvent en secret d’une vie meilleure (et donc d’Europe… et d’Italie).
La description de la vie modeste d’une famille sénégalaise est à la fois très sobre et très belle. En quelques plans, Matteo Garrone donne vie à ses personnages, les montre évoluer dans une famille aimante et qui semble heureuse. Il nous montre aussi l’envie d’ailleurs par le biais de ces ados qui rêvent d’Europe via Youtube et qui ne veulent pas croire ceux qui disent que tout n’est pas si simple. En commençant ainsi, le cinéaste fait le choix de l’universel et nous parle d’une époque, la nôtre, qui a tout d’un miroir aux alouettes, que l’on soit Africain, Européen ou Nord-Américain (même si les rêves d’un petit occidental n’ont pas les mêmes conséquences que celui d’un Sénégalais). Après ce préambule très réussi, Garrone nous entraîne dans la partie la plus longue de son film : la traversée de l’Afrique, du Sénégal à la Libye. C’est-à-dire le retour à la réalité. Sur ses images souvent somptueuses, le cinéaste donne à son film les allures d’un récit initiatique. Si le parcours est semé d’embûches, Garrone a la bonne idée de ne pas (trop) charger la mule et évite d’ajouter à une situation déjà dense des fioritures dramatiques qui auraient pu alourdir son propos.
Il sait également restituer la douleur engendrée par toutes les épreuves (soulignons à ce titre la prestation particulièrement juste et attachante de Seydou Sarr, la grande découverte du film). Malheureusement, la dernière partie ne parvient plus à éviter les écueils jusqu’ici évités. La traversée de la Méditerranée n’évite pas le trop plein d’effets dramatiques et d'espoirs sirupeux. On aurait envie de dire au jeune héros de se calmer un peu, et que la suite ne va pas être si facile. Mais on préfère le laisser espérer. Surtout, on préfère se souvenir de tout ce qui précède. Car malgré nos réserves finales, Io Capitano mérite vraiment d’être vu.
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