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10 septembre 2020

★★ | Jumbo

★★ | Jumbo

Réalisation: Zoé Wittock | Dans les salles du Québec le 11 septembre 2020 (AZ Films)

Vu dans le cadre du festival Fantasia 2020

Jeanne (Noémie Merlant), jeune femme à la timidité maladive étouffée par une mère particulièrement extravertie (Emmanuelle Bercot), est gardienne de nuit dans un parc d’attraction. Son supérieur (Bastien Bouillon) s’intéresse respectueusement à elle... mais elle n’a d’yeux que pour un manège, dont elle tombe éperdument amoureuse. Le point de départ ressemble à celui d’une comédie loufoque, mais il n’en est rien. Jumbo nous entraîne en effet dans un imaginaire propre à la rêverie, visuellement très soigné. Un manque de personnalité dans la mise en scène et quelques excès de fausse originalité se font certes sentir, mais le point de départ est prometteur. Malheureusement, ce fil narratif s’étiole rapidement, il est vrai peu aidé par des dialogues et des situations laissant plus de place au ridicule qu’au charme. Si nous souhaitons malgré tout rester indulgent, la tâche devient difficile lorsque le film bascule vers le drame familiale maladroit qui le transforme en projet définitivement trop ambitieux pour une cinéaste/scénariste qui finit par se faire écraser par sa proposition.
Techniquement irréprochable, posant de manière originale des questions pertinentes sur la santé mentale, la normalité ou le rôle joué par les proches, ce premier long-métrage aurait probablement mérité un meilleur sort. Souhaitons à Zoé Wittock de canaliser ses ambitions futures (et/ou d'avoir recours à un coscénariste talentueux). Peut-être serons nous agréablement surpris!

2 septembre 2020

Fantasia 2020 | ★★★ | Perdida

Fantasia 2020 | ★★★ | Perdida

Réalisation : Jorge Michel Grau
Perdida possède tous les éléments d’un bon thriller. De belles personnes (selon les standards de l’industrie), des triangles amoureux (pourquoi se limiter à un) ainsi qu’une mystérieuse intrigue à résoudre. Du jour au lendemain, la femme d’un chef d’orchestre disparaît sans laisser de trace. S’agirait-il d’un meurtre ? Hanterait-elle la maison dans laquelle vivent toujours son mari et sa toute nouvelle conquête ? S’ensuivra un véritable jeu de miroirs entre un passé pas si lointain (la disparition remonte à dix jours) et le présent (de plus en plus inquiétant). Le film tient en haleine en jouant sur ses multiples suppositions.
De plus, il est intéressant de constater la déviation du récit qui débute avec l’histoire d’un homme infidèle, imbu de lui-même, obsédé par son métier. Alors qu’on pourrait croire que le film est centré autour ce personnage, ce sont les femmes de sa vie qui occupent l’espace. Entre sa femme disparue, celle plus jeune qui vit désormais avec lui et le spectre d’une maîtresse (qui n’est jamais très loin), Perdida manque une belle occasion de rendre justice à la complexité de ses personnages féminins. Quelques précisions scénaristiques autour du dialogue impossible entre ces trois femmes (trahies par le même homme) auraient été bénéfiques. De plus, le film ne fait pas honneur à ces femmes qui subissent même lorsqu’il est trop tard. Lorsqu’il faudrait se battre et confronter. 
Il y a également une dimension politique sous-exploitée (les personnages vivent dans l’ancienne maison d’un homme d’État) qui au final ne sert à rien. Perdida demeure un thriller efficace à voir ne serait-ce que pour l’utilisation habile de l’imagerie soignée et de la musique. Un film à regarder et à écouter.
Fantasia 2020 | ★★★ | Lapsis

Fantasia 2020 | ★★★ | Lapsis

Réalisation : Noah Hutton
Lapsis, du réalisateur américain Noah Hutton, se situe dans un futur proche où la technologie contrôle désormais toutes les sphères de la vie en société. Sous le prétexte d’assurer une meilleure qualité de vie (majoritairement économique), la technologie quantum permet à des gens ordinaires d’amasser de l’argent rapidement. C’est avec cette prémisse que le réalisateur nous présente son protagoniste, un homme d’un certain âge un peu vieux jeu, qui s’oppose à toute forme d’avancée technologique. Convaincu qu’on ne peut pas faire confiance au quantum, il exprime ses opinions tranchées à qui veut l’entendre. Sa situation financière précaire le force à reconsidérer son aversion. Il ne manquera pas d’aviser tous ceux qui croiseront sa route que malgré son mépris pour le quantum, la fin justifie les moyens.
Malgré une entrée en matière quelque peu laborieuse où on assiste à un cours 101 sur le Quantum à travers divers procédés de transmission d’informations (radio, télévision, etc.), le film parvient toutefois à se défaire de cet aspect didactique pour nous plonger dans une histoire plus nuancée (moins basée sur la logique). Lapsis n’est pas un film à la recherche de sens malgré le caractère informatif des personnages secondaires. Les travailleurs qui parcourent des terrains boisés afin de brancher des câbles à des connecteurs ne sont que des outils servant la technologie. On en sait peu sur eux. Ils ne font que parler du travail, des règles strictes à suivre, de la surveillance constante, des points accumulés, de l’argent à faire, des robots qu’il faut toujours dépasser.
À travers les yeux du personnage principal qui semble toujours en retard ou perdu dans le moment présent, Lapsis peut sembler confus. Toutefois, les quelques points de repère nous permettent en tant que spectateur d’accepter ces pertes de sens. Si l’on accepte de ne pas tout saisir et que certains éléments sont contradictoires, le film se transforme en un objet charmant et sans prétention.
Fantasia 2020 | ★★ | Survival Skills

Fantasia 2020 | ★★ | Survival Skills

Réalisation : Quinn Armstrong
Survival Skills débute comme un vidéo de formation sur le métier de policier tout droit sorti des années 80. D’emblée, la qualité visuelle (de type VHS) ainsi que l’implacabilité du narrateur (interprété avec brio par Stacey Keach) donnent le ton. À travers une série de mise en situation où est placée une jeune recrue du corps policier (Vayu O’Donnell), les procédures du département sont passées au peigne fin. Passionné par son métier et ce qu’il représente pour sa communauté, le jeune policier zélé est désireux de respecter les consignes à la lettre.
C’est lors d’un appel pour violence conjugale que la vision du cadet bascule. À partir d’un personnage assez candide, le réalisateur déconstruit le mythe de la loi et l’ordre. Au sein même du corps policier, le novice rencontrera plusieurs obstacles, notamment de la part de ses collègues et du narrateur (mécontent de ses faiblesses). La remise en question du rôle de policier et l’application du pouvoir lié à la fonction provoquent un changement du dispositif narratif. Le tout ne se fait pas sans heurt. On passe d’un vidéo de formation à la fiction, puis au documentaire en effectuant de constant va et viens.
En quête d’humanisation du personnage principal (un bon policier en phase avec ses émotions), le film ne parvient pas à convaincre. Le système qui encadre le corps policier est à revoir, le blâme ne revient pas nécessairement aux agents qui font de leur mieux. À ce raisonnement, on peut ajouter un narrateur prenant conscience sous nos yeux de son rôle en révélant ce qu’on sait déjà depuis le début. Tout ceci n’est que mise en scène. Rien n’est vrai. C’est à travers la recherche d’un propos nuancé sur le métier de policier, peut-être liée à son manque d’une prise de position, que Survival Skills se transforme en un rendez-vous manqué.

30 août 2020

Fantasia 2020 | ★★½ | The Columnist (De kuthoer)

Fantasia 2020 | ★★½ | The Columnist (De kuthoer)

Réalisation : Ivo Van Aart
The Columnist propose une incursion sur les répercussions liées aux dérapages qui surviennent sur les réseaux sociaux. Dans le film, l’auteure d’une chronique dans un blogue reçoit de virulentes critiques, aussi bien en commentaire de son article que sur compte personnel Twitter. Ces messages sont à la fois choquants et perturbants. Malheureusement, cette humiliation sur la place publique nous ramène à notre quotidien. Combien de fois avons pu lire des messages dégradants et gratuits sur les réseaux sociaux.
La phrase que répète l’auteure tout au long du film est quelque peu simpliste : « Nous pouvons avoir des opinions différentes tout en restants gentils. » Simpliste, mais vraie. Au lieu de sombrer dans la dépression (ou pour éviter d’y sombrer), elle décide de prendre les choses en mains et d’aller à la rencontre de ses détracteurs. Les conséquences seront tragiques.
À la recherche du tragi-comique, le film ne réussit pas totalement à trouver le ton juste. Il semble hésiter entre la comédie appuyée (aussi bien dans la direction d'acteurs que dans les autres choix artistiques, notamment au niveau de la musique, beaucoup trop ludique) et l’aspect un peu plus gore. Tout comme le personnage principal, on ne sait jamais si on doit en rire ou en pleurer… Mais c’est peut-être justement cette impression de malaise que le réalisateur souhaite transmettre au spectateur.
The Columnist met en scène une femme qui choisit de riposter (de manière très violente) contre les attaques qu’elle a subies. Pour elle, les mots virulents et cruels écrits par d’autres ont un effet dévastateur. Malgré ses défauts, le film permet une réflexion pertinente sur une femme dont la vie gravite autour de l’écriture et qui sait à quel point chaque mot est important.
Au final, la parole ne pourra pas la sauver.
Fantasia 2020 | ★★★ | My Punch-Drunk Boxer (판소리 복서)

Fantasia 2020 | ★★★ | My Punch-Drunk Boxer (판소리 복서)

Réalisation: Jung Hyuk-ki
Un jeune homme introverti et passionné par la boxe décide qu’à 29 ans, il est grand temps de se consacrer à sa passion. Avec l’aide d’un entraîneur (qui est plus ou moins motivé à l’entraîner) et d’une jeune femme qui partage son intérêt (en plus de jouer du tambour), il partira à la conquête du monde de la boxe.
Construit comme de nombreux films baignant dans un univers sportif, le personnage principal (un perdant déterminé) devra tracer sa voie vers le chemin de la victoire. Cette histoire de persévérance est déjà vue, et on la reverra certainement dans d’autres films, mais le film de Jung Hyuk-ki se démarque par ses choix de mise en scène, son utilisation de la musique (notamment avec des chansons humoristiques qui narrent certains moments où états émotifs du personnage principal), le rythme soutenu (structuré comme une pièce musicale) ainsi que le scénario habilement ficelé.
My Punch-Drunk Boxer est une comédie rafraîchissante aux dialogues savoureux livrés par des comédiens hors pair. La qualité du scénario est indéniable sans toutefois offrir de rebondissement ou surprise majeure. Le réalisateur réussit ainsi un tour de force en offrant à son public une résolution prévisible qui ne nuit en rien à une œuvre nuancée et d’une grande sensibilité.

28 août 2020

Fantasia 2020 | ★★★ | Tezuka's Barbara

Fantasia 2020 | ★★★ | Tezuka's Barbara

Réalisation: Macoto Tezuka
En associant d’emblée la musique très jazzy et nerveuse de Ichiko Hashimoto, la superbe photo nocturne et colorée de Christopher Doyle et ce personnage d’écrivain star totalement désabusé qui se cache derrière ses lunettes noires, Macoto Tezuka (qui adapte ici un manga signé par son père) fait naître rapidement une sensation bizarre. Avant même que le moindre élément narratif ne soit développé, nous pressentons comme une évidence que Barbara sera l’histoire d’un déclin. Ce sentiment est bien évidemment rapidement amplifié par le personnage de Barbara lui-même, jeune femme perdue, alcoolique, amatrice de magie noire, belle, incontrôlable, ne quittant presque jamais son trench déchiré. Cette femme que les autres ne voient jamais, sorte de caricature de femme fatale d’un monde parallèle, annonce le pire. Mais qui est-elle vraiment? Muse fantasmée? Mr Hyde au féminin? une chose est sûre, elle vient ébranler l’assurance de l’écrivain vedette et le confronte à la médiocrité réelle de ses livres à succès!
Le point de départ est passionnant, mais le film ne convainc jamais autant qu’on le souhaiterait. Malgré ses qualités visuelles et sonores, il ne semble jamais rentrer totalement dans son sujet, à savoir les doutes de l’artiste populaires face à un succès qui peut sembler démesuré. Nous aurions aimé voir un peu plus de douleur, être un peu plus déstabilisé par un film moins sage… et surtout un peu moins éloigné des affres de la création et de la souffrance humaine!
Reste toutefois un film visuellement très agréable. C'est déjà pas si mal!

27 août 2020

Fantasia 2020 | ★★★ | Hunted

Fantasia 2020 | ★★★ | Hunted

Réalisation: Vincent Paronnaud

Avec Hunted, Vincent Paronnaud (auteur de BD sous le pseudo Winshluss, mais également coréalisateur de quelques films avec Marjane Satrapi, dont Persepolis) offre au public de Fantasia un film qui aurait probablement beaucoup fait s’exalter l’habituel public très participatif du festival. La Covid permettra donc au moins aux grincheux que nous sommes d’apprécier le film dans l'environnement calme de notre intérieur. (Même si, avouons-le, il aurait aussi mérité d’être vu sur un grand écran en raison de ses qualités visuelles!)
Certes, le point de départ est sans surprise: un homme séduit une femme, ils passent à la vitesse supérieure mais l’homme est plus inquiétant que prévu, la femme s’enfuit et la chasse commence. Mais ici, au-delà des qualités requises par le genre survival pour que le film soit réussi, on retrouve certains éléments particulièrement intéressants. Non seulement Vincent Paronnaud parvient à conférer à son film une dimension sociétale grâce aux différents portraits qu’il dresse avec justesse, mais en plus, il donne à Hunted une dimension toute particulière en inversant certains thèmes de conte de fées. Le grand méchant loup n’est en effet pas le loup, mais l’homme. D’ailleurs, les humains qui cherchent à aider la femme en détresse n’y parviennent pas et le salut viendra de la bête. Cette spécificité permet à Paronnaud de sortir des codes du genre de manière cohérente en faisant jouer à la nature un rôle protecteur. En découleront quelques scènes de forêt nocturnes, à la limite de l’onirisme ou du surnaturel, visuellement très convaincantes.
Efficace, mais pas uniquement, Hunted est donc une belle petite surprise de la part de Paronnaud... Vivement son prochain film en solo!

25 août 2020

Fantasia 2020 | ★★★¼ | Labyrinth of Cinema (海辺の映画館 キネマの玉手箱)

Fantasia 2020 | ★★★¼ | Labyrinth of Cinema (海辺の映画館 キネマの玉手箱)

Réalisation: Nobuhiko Obayashi
Parmi les films que ne nous voulions manquer sous aucun prétexte dans le cadre de ce Fantasia 2020 figure incontestablement le dernier film de Nobuhiko Obayashi, mort en avril dernier à l’âge de 82 ans.
Avec cet ultime film, le cinéaste suit trois jeunes hommes qui assistent à une projection dans un vieux cinéma. Ils se retrouvent littéralement projetés dans des films anciens et permettent ainsi aux spectateurs que nous sommes de les accompagner dans un voyage aussi bien dans l’histoire du cinéma japonais que dans celle du Japon (en parcourant plus précisément l’époque féodale, la guerre sino-japonaise et la seconde guerre mondiale, avec Hiroshima en point d’orgue) et de croiser entre autres des figures comme Miyamoto Musashi ou Yasujirō Ozu.
Pourtant réalisé par un vétéran, le film semble au début signé par un adolescent amateur de pop culture qui revisite avec insolence ses classiques. Les longues premières minutes, relativement poussives, glissent progressivement vers plus de maîtrise et de gravité, tout en conservant une fantaisie toujours omniprésente mais de mieux en mieux dosée... Au fur et à mesure qu’il progresse, ce film testament (pour une fois, l’expression n’est pas galvaudée) devient de plus en plus touchant et permet à Nobuhiko Obayashi de rendre un dernier hommage à son cinéma national tout un livrant un ultime message anti-guerre et en nous rappelant par ses excès stylistiques qu’il n’est jamais trop tard pour en faire toujours un peu trop!

20 août 2020

Fantasia 2020 | ★½ | Chasing Dream (我的拳王男友)

Fantasia 2020 | ★½ | Chasing Dream (我的拳王男友)

Réalisation: Johnnie To
Johnnie To est prolifique, nous a offert plusieurs très bons films (dont Three, le dernier en date, projeté à Fantasia il y a 4 ans)… mais aussi des beaucoup moins bons. Son dernier Chasing Dream fait malheureusement partie de cette dernière catégorie.
Piètre comédie romantico-mélodramatique, le film fait le grand écart entre le film de boxe (avec certaines scènes plutôt efficaces) et le film de concours de chant télévisuel (considérons ça comme un sous-genre) saupoudré de pop asiatique sirupeuse (mais comportant aussi, avouons-le, quelques bonnes idées).
Les rares aspects positifs du film ne suffisent pas à nous faire oublier une déferlante de guimauveries qui collent aux doigts (de surcroît vues ailleurs à de nombreuses reprises, et souvent en mieux) et de petites touches d’humour pas drôle du tout.
Johnnie To étant le plus gros nom de cette programmation de Fantasia 2020 100% virtuelle, la déception est donc évidente... mais le festival débute aujourd’hui! Alors, on espère voir très bientôt quelques petites trouvailles dont les programmateurs du festival ont le secret!

31 juillet 2019

Fantasia 2019 | ★¾ | Aquaslash

Fantasia 2019 | ★¾ | Aquaslash

Réalisateur: Renaud Gauthier
Fantasia n'est pas le lieu de prédilection pour le cinéma québécois. Pourtant, parmi les rares bonnes surprises fleurdelisées de ces dernières années figurait le très référentiel et plutôt réussi Discopath (présenté à Fantasia 2013, mais que nous avions vu aux RVCQ l'année suivante) de Renaud Gauthier.
Nos attentes étaient donc réelles avec Aquaslash... et elles ont été grandement déçues. Le film ne fait certes qu'1h20, mais il est interminable. Autant le déluge référentiel de Discopathe alimentait la créativité du cinéaste, autant il semble le brider ici et lui imposer des pistes sur lesquelles il se perd: l'humour tombe à plat de manière quasi systématique (on rit tout de même 2 ou 3 fois), le cinéaste n'arrive jamais à s'élever au-dessus de sa potacherie, les scènes gores tant espérées se font attendre pendant une éternité (et manquent d'inventivité), les passages obligés narratifs sont des impasses... 
Heureusement, pour sauver son film du désastre, Gauthier peut compter sur son talent: subrepticement, à l'occasion de petites parenthèses narratives, il nous rappelle son sens de l'image, des couleurs, des formes: une minute par-ci, trois minutes par là, un plan ici, un autre là... mais rien de plus.
Le cinéaste aurait probablement eu assez de matière pour un bon court-métrage. Il a préféré le noyer dans une cascade d'insignifiance qui semble ne plus finir. Dommage.

• Signalons que nous avons vu la director's cut. Nous serions presque curieux de voir la version producteur... Quoi que! En aurions-nous vraiment l'envie?

28 juillet 2019

Fantasia 2019 | ★★★½ | Idol

Fantasia 2019 | ★★★½ | Idol

Réalisateur: Lee Su-jin
Décidément, Lee Su-jin est en train de devenir le nouveau chouchou de Fantasia. Il y a cinq ans, Han Gong-ju (son premier film) était sur toutes les lèvres; cette année, le cinéaste remporte le prix Cheval noir du meilleur film du festival avec Idol.
En deux films, le cinéaste se place déjà dans le club des excellents cinéastes coréens tant sa maitrise impressionne. Le point de départ du film est simple: un homme politique découvre que son fils est à l'origine d'un délit de fuite. À partir de cela, les personnages se multiplient en prenant tour à tour le rôle principal et nous entraînant dans une multitude d'univers permettant au cinéaste d'aborder un grand nombre de thèmes (enjeux électoraux, lutte des classes, immigration, etc.). L’intrigue assez complexe menace d’entrainer le spectateur dans un tourbillon qui pourrait le perdre, mais il n’en est rien, Lee Su-jin parvenant à trouver le liant qui permet au tout de ne jamais s’effriter. Une mise en scène précise (soutenue par une direction photo très sombre) semble en effet servir de moteur à des personnages très rigoureusement définis. Cela évite au film de partir dans tous les sens: il tisse ainsi un lien entre ses personnages appartenant à cette Corée contemporaine qui semble empreinte d’une grande noirceur (à en croire le cinéma local de ces dernières années).
En complexifiant une intrigue qui devient progressivement de plus en plus difficile à résumer en quelques mots, Lee Su-jin nous livre en fait un instantané distancié et pessimiste. Mais il s’agit plus de l'instantané d’une époque que celui d’une société précise. C’est d’ailleurs peut-être pour cela qu'Idol touche autant... et de manière si universelle!

23 juillet 2019

Fantasia 2019 | ★★★ | Bliss

Fantasia 2019 | ★★★ | Bliss

Réalisé par Joe Begos
Une jeune peintre en manque d’inspiration goûte à une drogue qui la fait progressivement plonger dans une transe vampirique sanglante particulièrement propice au retour de son inspiration…
Avec un tel sujet, le très sexe/drogue/ rock’n’roll Joe Begos pouvait aller un peu partout et nulle part. Probablement contre son gré, il va plutôt nulle part en enfilant les banalités et lieux communs et prend la direction d’une fin très convenue. Cependant, malgré ses limites et une première moitié de film particulièrement poussive, nous devons reconnaître que ce Bliss mérite qu’on oublie son surplace narratif et sa symbolique lourdingue pour retenir ce qui semble particulièrement intéresser son réalisateur : son crescendo impressionnant de propositions formelles aussi brillantes qu’éprouvantes. Sa capacité à nous projeter entre réel et cauchemar et à rendre la violence fascinante est en effet particulièrement bluffante.
De son côté, l’actrice Dora Madison, qui ajoute un soupçon d’humanité en perdition grâce à sa performance d'écorchée vive dépassée par son regain de création (auto) destructrice, est tout aussi fascinante que les meilleurs moments de ce Bliss.
Très imparfait, un peu long malgré ses 1h20, mais à voir pour quelques poignées de minutes qui font oublier ses faiblesses!

19 juillet 2019

Fantasia 2019 | ★ | Sadako

Fantasia 2019 | ★ | Sadako

Réalisé par Hideo Nakata
Hideo Nakata a indéniablement marqué le cinéma d’horreur japonais. Non seulement, il a réalisé l’excellent Dark Water, mais il est également à l'origine de Ringu, l'une des franchises les plus connues dans l'univers cinématographique horrifique (pas seulement japonais... il a d’ailleurs réalisé par le passé une suite très satisfaisante du remake américain).
Avec Sadako, film d’ouverture de la nouvelle édition de Fantasia, il nous montre non seulement que le filon est épuisé, mais que son talent s’est envolé avec!
Certes, le film est techniquement irréprochable... mais il n’y a rien d’autre à sauver. Scénario très faible multipliant les coïncidences de manière indécente, personnages transparents et caricaturaux, mise en scène incapable de faire ressentir la moindre tension, musique mal utilisée, dialogues trop souvent risibles qui ne font qu’accentuer notre sentiment de rejet envers cette œuvre clairement dispensable.
On oublie au plus vite...

17 juillet 2019

Fantasia 2019 | ★★¾ | Porno

Fantasia 2019 | ★★¾ | Porno

(Réalisé par Keola Racela)
Une petite ville américaine très chrétienne; une époque révolue où films et pellicule étaient indissociables ; des ados un peu bébêtes mais sympathiques ; un lieu secret dont la découverte va faire ressurgir l’improbable; un film caché au pouvoir maléfique; du gore rigolo; du sexe, mais pas trop... voilà les ingrédients de Porno, sympathique premier film qui se classe d'emblée dans la lignée des comédies nostalgiques maniant le second degré avec un plaisir non dissimulé.
Le genre est assez fréquent à Fantasia, mais le résultat n'est pas toujours réjouissant. Fort heureusement, le réalisateur de Porno ne tombe pas dans certains pièges. Ses clins d'œil sont maîtrisés, son second degré n’est jamais étouffant et ses personnages parviennent à assumer les clichés sans être des caricatures faciles. Surtout, Racela possède un savoir-faire technique et un humour qui rendent le film agréable à voir presque d’un bout à l’autre. Presque… car malgré quelques moments particulièrement plaisants, le film souffre de problèmes de rythme. Le scénario, qui cherche à aller dans plusieurs directions référentielles, finit par se perdre un peu en chemin au point de perdre par moments le metteur en scène. Du coup, celui-ci semble laisser filer certaines scènes pour tout donner (avec talent) sur d'autres (d'un film satanique expérimental à une scène gore testiculaire aussi drôle qu'éprouvante… pour ne citer qu'elles).
Divertissant mais très inégal, Porno a également un autre mérite : il nous permet de découvrir un réalisateur (Keola Racela) très prometteur. Nous avons hâte de le recroiser bientôt… à Fantasia ou ailleurs !

12 décembre 2018

★★★ | Under the Silver Lake (Sous le Silver Lake)

★★★ | Under the Silver Lake (Sous le Silver Lake)

Réalisé par David Robert Mitchell | Dans les salles du Québec le 14 décembre 2018 (Métropole)
Critique rédigée dans le cadre du festival Fantasia 2018

Avec son dernier film, David Robert Mitchell nous rappelle d’emblée qu’il est extrêmement talentueux. Sans la moindre gêne, il multiplie hommages et références, aussi bien à Hitchcock qu’à la comédie adolescente, à la comédie romantique d’antan qu’à David Lynch, tout en redonnant naissance à Marilyn Monroe et en frôlant l’overdose de clins d’œil sous toutes leurs formes (dans l’utilisation d’une musique, la manière de filmer un plan, mais également en multipliant les affiches et extraits de film). Loin de tourner à la bouillie référentielle, sa première partie est un pur bonheur cinéphile qui nous prouve à chaque instant à quel point Mitchell peut tout faire et maîtrise aussi bien sa force comique que son goût pour un cinéma formellement exigeant. 
Pourtant, progressivement, les choses se gâtent. L’humour déraille, le développement narratif aux allures de remplissage bâclé prend le dessus sur la maîtrise formelle, la fantaisie est plus poussive que nonsensique, le rythme s'essouffle, et le talent de David Robert Mitchell semble fondre comme un bonhomme de neige à Los Angeles. Semble… car le cinéaste prend la peine de nous rappeler qu’il reste en contrôle de tout, y compris des maladresses, trop flagrantes pour ne pas être souhaitées: au milieu d’un film qui semble perdre pied, il nous rassure régulièrement avec un plan, une idée, une scène ou un détail. Ce n’est certes pas suffisant pour impressionner, mais ça l’est assez pour maintenir notre attention, notre intérêt, et nous permettre de l’accompagner dans son voyage au cœur d’un vide au gout d'oxymoron: le vide par le trop-plein. C’est d’ailleurs ce voyage qui rend le film à la fois passionnant et complémentaire de ses œuvres précédentes, situées à Detroit. Après avoir filmé (dans It Follows et dans The Myth of the American Sleepover) des lieux qui se vident, des piscines désertes, des stationnements abandonnés et une jeunesse qui s’occupe comme elle peut, il s’intéresse ici à l’inverse: Los Angeles. La ville bâtie sur les rêves, où rien ne peut être quelconque, où tout est possible, où chacun a la certitude d’exister, mais également où tout doit avoir un sens… de la plus insignifiante performance au plus insignifiant détail. C’est ce qui va être à l’origine de la quête de Sam (Andrew Garfield, pour une fois excellent): trouver du sens à ce qui n’en a pas forcément… et donc se perdre dans la vacuité (pour lui insoupçonnée) de tout ce qui l’entoure! Comme David Robert Mitchell est respectueux de son personnage, il se perd lui aussi un peu dans son propre film. La démarche pourrait être louable, mais le fait de perdre son spectateur en route l'est un peu moins.
Contrairement à Sofia Coppola, qui nous a démontré qu’il est parfaitement possible de faire des films sur un sujet similaire (la vacuité (par le néant dans Somewhere et par l’insignifiance dans The Bling Ring)), Mitchell passe à côté. Heureusement, non seulement son talent omniprésent limite la casse, mais sa démarche artistiquement presque suicidaire fascine.
Et si Under the silver Lake était le meilleur film raté depuis des lustres?

13 septembre 2018

★★★ | Mandy

★★★ | Mandy

Dans les salles du Québec le septembre  2018
Critique rédigée dans le cadre du festival Fantasia 2018

Dès les premières scènes, Mandy de Panos Cosmatos, plonge le spectateur dans un univers visuel unique et envoûtant. En 1983, Mandy (une interprétation brillante d’Andrea Riseborough) et Red (Nicolas Cage) habitent une maison isolée en pleine forêt. Heureux, ils vivent un amour fusionnel sans se douter que les forces du mal rodent non loin d’eux. Ces moments de leur quotidien sont sans doute les plus intéressants du film. La vie commune du couple nous permet d’entrevoir la profondeur du personnage Mandy. Ses illustrations représentant un monde de science-fiction sont transposées à l’écran de manière inspirée. D’ailleurs, l’aspect visuel du film est l’une de ses plus belles qualités. La photographie ainsi que les effets spéciaux nous rappellent un cinéma d’une époque. De plus, la fascinante trame sonore du compositeur Jóhann Jóhannsson renforce habilement l’atmosphère troublante qui se dévoile lentement. Mais la transition entre la vie paisible et l’histoire de violence qui suivra ne se fera pas sans heurts. Le traitement autour du culte religieux nous laisse sur notre faim. L’introduction trop longue de ses membres ainsi que de leur maître n’apporte rien de plus au scénario si ce n’est que de justifier certaines motivations douteuses. La seconde moitié du film se déroule comme une suite logique d’événements. Red, le cœur brisé et sous le choc, se fait un point d’honneur de venger la mort de sa douce. Il part donc à la chasse contre les hommes (et les femmes) qu’il sait coupables. Aidé d’une formule spéciale de LSD, notre héros sans peur et sans reproches infligera de terribles souffrances à ses opposants. Dans une logique d’œil pour œil, le sang coulera à flots. Tel un tigre sortit de sa cage, Red pourra finalement exprimer sa rage. Les amateurs des films de John Carpenter ou de Walter Hill trouveront leur bonheur. D’ailleurs, de nombreuses références au cinéma des années 70 procurent un charme certain à Mandy.
Cependant, on aurait aimé une certaine prise de risque chez le réalisateur (qui est également coscénariste). Pourquoi ne pas transcender l’hommage et offrir une alternative aux films du genre. Andrea Riseborough est resplendissante dans son interprétation du rôle de Mandy. En quelques scènes, elle parvient à nous démontrer la force intérieure de son personnage. Toutefois, cette force n’est pas traduite en action et Mandy devient rapidement la victime à sauver. Torturée, maltraitée, elle n’est plus maîtresse de sa destinée et sera reléguée au rôle de moteur de vengeance pour le personnage masculin. On se demande comment aurait été le film si le réalisateur avait pris un risque et choisi d’inverser les rôles, avec Mandy en héroïne et non en victime. 
Soyez sans crainte, le film fonctionne tout de même très bien. L’histoire est prenante (surtout le premier tiers), les scènes d’action sont bien chorégraphiées, la trame sonore transporte le spectateur dans un état de transe et visuellement l’ensemble est inspirant. Panos Cosmatos réussi bien son hommage au cinéma, à la musique et à la littérature qui l’ont marqué. Il aurait juste été intéressant de voir Mandy se lancer à la poursuite des responsables de la mort de son amoureux. Ce sera pour une prochaine fois!
★★½ | Madeline's Madeline

★★½ | Madeline's Madeline

Réalisé par Josephine Decker | Dans les salles du Québec le 14 septembre 2018 (Cinéma du Parc)
Critique rédigée dans le cadre du festival Fantasia 2018

L'adolescente Madeline (Helena Howard, révélation que l'on espère revoir très bientôt) s'éveille petit à petit au désir, doit faire face à une mère un peu trop protectrice et passe par la case théâtre, activité qui semble aussi importante sur le plan créatif que pour l'aider à améliorer sa vie (accepter celle de demain et régler ses comptes avec celle d'hier et des problèmes de santé mentale). Avec un tel point de départ, et de tels sujets abordés (passage à l'âge adulte, rôle quasi thérapeutique de la création, environnement familial pesant, etc.), Josephine Decker aurait facilement pu tomber dans le piège de la sur-explication narrative et du recours excessif à la psychologie. Sa grande force est d'avoir tourné le dos à ces passages obligés du cinéma mainstream. Elle préfère nous présenter son héroïnes et les enjeux de son récit par petites touches qui viennent progressivement former en ensemble cohérent, composé de personnages dont on sait assez peu de choses, mais qui finissent par être toutefois suffisamment définis.
Malheureusement, elle va un peu trop loin dans sa démarche, en optant pour un angle qui aurait pourtant pu ne pas nous déplaire: utiliser le plus possible les armes du cinéma, en jouant sur le son, le cadrage, la mise au point, dans le but (trop) évident de traduire les sentiments de son héroïne, son rapport au réal, son imprévisibilité, sa fragilité… Malheureusement, tous les effets dont (ab)use Decker ne parviennent jamais à nous faire ressentir une émotion. Ils ne sont rien d'autre que des artifices au service d'intentions trop visibles. Ainsi, jamais le spectateur doit se contenter de subir des effets de cinéma destinés à traduire cette émotion. Par conséquent, l'envie de cinéma de Decker étouffe constamment son héroïne et, avec elle, son propos.
Pourtant, dans une scène magnifique qui permet à Madeline de régler ses comptes avec sa mère sous couvert d'une performance scénique, le cinéma de Decker se fait plus subtil, ses effets moins ostensibles: le résultat est d'une grande force. Certes, ce moment où Decker se libère de l'usage de ses effets trop maladroits correspond à celui où l'héroïne se libère de la chape maternelle. Si on comprend la volonté conceptuelle, nous ne pouvons nous empêcher de nous demander si elle était vraiment indispensable. Decker n'aurait-elle pas pu nous faire ressentir des émotions, au lieu de nous montrer par quel moyen elle souhaitait y parvenir?

3 août 2018

 Fantasia 2018 selon Pascal Grenier | 3/3

Fantasia 2018 selon Pascal Grenier | 3/3

Bodied (Joseph Kahn)
À en juger par la qualité des nombreux films visionnés au cours des trois dernières semaines, la 22e édition du festival international de films Fantasia ne passera pas à l’histoire. Est-ce le reflet de la pauvreté du cinéma de genre actuel? Probablement, mais cela vient peut-être aussi de la difficulté pour les organisateurs de trouver de bons films à temps pour le festival. Cependant, malgré une programmation décevante en général, certaines œuvres ont retenu mon attention lors de la dernière semaine.

Après son passage au TIFF en septembre l’an dernier, il reste impensable qu’un an plus tard ou presque, le sulfureux et délicieux Bodied de Joseph Khan (Torque, Detention) n’ait toujours pas trouvé preneur auprès des distributeurs. Véritable hymne à la liberté d’expression, cette virulente critique de la société américaine sur l’art de performance qu’est le battle rap trouve sa cible en s’attaquant ouvertement à la rectitude politique de plus en plus présente sur les médias sociaux et sur toutes les sphères en général. Le scénario frappe dans le mille et la mise en scène dynamique suscite l’intérêt d’un bout à l’autre.

Modeste mais bien construit, le film d’épouvante The Witch and the Window de Andy Mitton est le genre de film qu’on aimerait voir plus souvent. Le réalisateur privilégie l’atmosphère aux effets-chocs ou sanglants et le film gagne au change avec cette progression dramatique plus senti que dans la moyenne des films du genre. Une belle réussite comme on en a peu vu au festival cette année.

Sept ans après son documentaire satirique The Ambassador, le danois Mads Brügger passe à la fiction avec le drôlissime St. Bernard Syndicate. Tout en gardant un style proche du documentaire, cette satire subversive sur le capitaliste mondial offre un curieux mélange d’épisodes ironiques et de situations étranges. Bien que la finale laisse un peu à désirer, on se laisse charmer par ce mélange d’ironie et d’observations sociales qui renvoie au True Stories de David Byrne revu et corrigé par Christopher Guest.

31 juillet 2018

Fantasia 2018 | ★★★ | Tokyo Vampire Hotel

Fantasia 2018 | ★★★ | Tokyo Vampire Hotel

Réalisé par Sion Sono
Initialement, Sion Sono a développé Tokyo Vampire Hotel comme une série pour Amazon studios. Il a ensuite réduit son montage pour en faire un film du tiers de sa durée. Tokyo Vampire Hotel gagne beaucoup dans cette transition mais, finalement, perd tout autant. Malgré toute l'énergie déployée par Sono, son projet reste toujours brouillon et donne l’impression de ne pas être complètement abouti.
On passera rapidement sur le récit qui mélange prophéties, romances et politicailleries de vampires immortels sans trouver pied. Si l’absurdité de certains éléments fait sourire, le tout ne reste qu’un prétexte pour orchestrer des scènes dont l’intérêt varie grandement. En multipliant les personnages caricaturaux et les enjeux, le film perd rapidement son spectateur dans un capharnaüm d’idées.
Sono est tout de même toujours capable de fulgurances. Elles sont peut-être plus rares ici que dans ses meilleures œuvres, mais lorsque Tokyo Vampire Hotel prend complètement forme, le résultat est bluffant. Le réalisateur mélange, à son habitude, le plus grotesque au plus sublime.
C’est dans son dernier tiers que le film prend vraiment forme. Le récit laisse alors place à un long affrontement où le réalisateur peut jouer allègrement avec ses idées formelles. Toutefois, loin de perdre le cœur émotionnel de son film, c’est plutôt à ce moment que Sono le trouve enfin. Entrecoupant des scènes de combats sanguinolents, le réalisateur installe un sentiment de mélancolie au travers de la violence. Si, en jouant sur les extrêmes, il lorgne souvent vers le mélodrame, la surenchère assumée permet aux éléments disparates d’exister ensemble dans une sorte de chaos esthétique.
Sur la série, le film a l’avantage de se perdre moins longtemps dans les dédales de son récit improbable. Très peu de temps est perdu à expliquer des particularités finalement sans intérêt. Par contre, la dernière partie de la série, sa plus belle, a ici été complètement évacuée au profit d’un récit plus linéaire. Le caractère épisodique qui permettait cette finale fait que, peut-être, celle-ci n’aurait tout simplement pas fonctionné à l’intérieur d’un film déjà trop brouillon. Il est regrettable que le cinéaste n’ait pas trouvé le moyen d’incorporer ces passages magnifiques à son film. 
Pendant longtemps Sono donne l’impression de ne pas savoir où il s’en va. En soi, Tokyo Vampire Hotel, le film, est loin des plus grands films de Sono, mais définir comme un film mineur serait ignorer que, dans de très courts moments, le réalisateur atteint un état de grâce et est vraiment à son meilleur.