5 septembre 2014

Aimer, boire et chanter ***½

Devant la maladie de leur ami, trois couples remettent en question leur quotidien et leur existence.

Réalisateur : Alain Resnais | Dans les salles du Québec le 5 septembre 2014 (A-Z Films)

Difficile d’imaginer un meilleur chant du cygne pour Alain Resnais que Aimer, boire et chanter, qui ressasse ses principales préoccupations et revient à un registre plus accessible après ses plus expérimentaux - et peut-être réussis - Les herbes folles et Vous n’avez encore rien vu. Adaptant une nouvelle pièce d’Alan Ayckbourn, cet ultime essai s’inscrit dans la lignée du diptyque Smoking / No Smoking et Cœurs, alors que la mise en scène complètement déconstruite, où d’immenses rideaux font figure de décors, fait muter lentement mais sûrement le théâtre vers le cinéma et offre de savoureux dialogues à des acteurs chevronnés qui s’amusent follement.
Récit sur la finalité et la renaissance, Aimer, boire et chanter rappelle à quelle point la vision du créateur d’illustres chef-d’œuvres tels Nuit et brouillard et Hiroshima mon amour n’est plus la même depuis les 35 dernières années (la seule exception étant le classique Mon oncle d’Amérique, en 1980). À une autre époque, cette histoire aurait été dramatique, comme l’était son sublime Providence en 1977. Ici, elle est comique, un brin mélancolique, mais terriblement légère.
Si l’on se retrouve devant un Resnais en mode mineur (c’était également le cas de son jouissif Pas sur la bouche, autre faux Feydeau où les hommes se sentent trahis par les femmes et où le cœur a, évidement, ses raisons), il ne faut pas bouder son plaisir pour autant. Devant une telle vivacité du verbe, une réalisation métaphorique qui arrive à être si inventive avec presque rien et une prestigieuse famille de comédiens (les habitués Azéma, Dussollier, Girardot, Sihol, Vuillermoz, ainsi que la petite nouvelle Sandrine Kiberlain) jouant au diapason, il y a de quoi être revigoré par cette vision touchante et absurde des relations humaines.
Et si la vie n’était, finalement, que du cinéma?
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