29 mai 2015

Transatlantique ***

Scrutant le quotidien d’un équipage à bord d’un paquebot commercial, Transatlantique nous propose une réflexion sur la condition humaine par le biais des images et du son.

Réalisateur : Félix Dufour-Laperrière | Dans les salles du Québec le 29 mai 2015 (La Distributrice de films)

Qu'y a-t-il de poétique dans la traversée transatlantique d’un paquebot commercial? Il faut voir l’essai documentaire de Félix Dufour-Laperrière pour le découvrir.
En utilisant un noir et blanc granuleux et texturé, le réalisateur a su capturer l’âme de cette énorme structure flottante. Pendant 72 minutes, nous suivons l’équipage du Federal Rideau dans la dernière étape de son périple qui le conduira jusqu’au fleuve St-Laurent, une traversée durant laquelle les marins vaquent à leurs occupations quotidiennes contre vents et marées. La proposition semble banale mais il faut voir les images prises par Nicolas Dufour-Laperrière et surtout entendre la bande-son capté par Gabriel Dufour-Laperrière pour bien saisir l’ambition du projet. C’est à un exercice de style que nous convie Transatlantique, une expérience sensorielle où la condition humaine se mesure à la puissance de l’océan dans un concert de bruits métalliques qui rappelle aux hommes que leur technologie est bien peu de choses face aux éléments qui se déchaînent dans l’Atlantique Nord.
Sous l’œil de Félix Dufour-Laperrière l’océan devient onctueux et menaçant. Le ressac des vagues prises en vues sous-marines ressemble étrangement à une marée noire qui se mélangerait à l’eau claire pour mieux la contaminer, ce qui ne manque pas de nous faire songer à l’impact environnemental d’une telle expédition. À cette réflexion se mêle les images d’un homme qui nettoie un drain, le corps à moitié immergé dans le tuyau tandis que les grincements du navire décuple la sensation de claustrophobie qui nous envahie. De simples corvées prennent une dimension particulière en haute-mer et le film traduit bien l’état d’esprit de ces marins pour qui le risque entre tout bonnement dans la définition de leurs tâches. Sans la moindre narration, seulement avec des images et du son, le réalisateur développe ainsi une réflexion qui nous prend par surprise.
D’ailleurs, c’est en voulant étayer son propos que le film s’essouffle dans sa dernière partie, lorsqu'il cherche trop à souligner le poids de la routine à bord du navire. Si le réalisateur n’a pas su donner un visage humain à cet équipage en exil, il force néanmoins le spectateur à s’interroger sur la condition humaine. En soit, c’est une réussite appréciable.
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