13 mai 2016

La loi du marché ****

Texte rédigé dans le cadre du FNC 2015.

À plus de 50 ans, après de longs mois de chômage, Thierry (Vincent Lindon, exceptionnel) commence un nouveau travail qui ne lui ressemble en rien. Serait-il prêt à tout accepter pour le conserver?

Réalisateur: Stéphane Brizé | Dans les salles du Québec le 13 mai 2016 (Cinéma du Parc)

Nous connaissons le talent de Vincent Lindon. Nous savons qu'il s'entend particulièrement bien avec Stéphane Brizé. Nous nous souvenons de son prix d'interprétation reçu à Cannes l'an dernier pour La loi du marché... et pourtant, dès les premiers instants du film, sa performance nous abasourdit tant il incarne avec force le désarroi d'un homme comme tant d'autres confronté aussi bien à la machine administrative qu’à la recherche d'un emploi. Ce n'est pas tout: dès cette première scène, nous pouvons constater que les rôles secondaires sont traités avec la même attention, que les dialogues sont d'une justesse exemplaire et que la caméra prend la bonne distance et parvient à faire ressentir une impression de prise sur le vif en trouvant la mobilité nécessaire sans pour autant abuser d'excès de tremblement «pour faire vrai».
En parvenant à rendre la première scène aussi simple sans user du moindre artifice, Brizé et son équipe impressionnent. Ils reproduiront ce tour de force durant la quasi totalité du film. Non seulement les scènes suivantes sont intrinsèquement exemplaires, mais la construction narrative l'est tout autant. En filmant des bribes du quotidien (recherche d'emploi, rendez-vous administratifs, loisirs, famille) sans chercher à tout prix à raconter une histoire, Brizé parvient à dresser le portrait d'un homme (et des difficultés sociales qu'il rencontre) en évitant de céder à certaines facilités dont abuse trop souvent le cinéma social. Ici, pas de manichéisme ou de démonstration moralisatrice: La loi du marché donne vie à un homme comme il y en a des millions à travers le monde, avec ses galères, ses doutes, ses espoirs et ses (très) petits plaisirs. Surtout, il y a des humains, qui cherchent à faire leur travail, sans penser particulièrement à nuire mais qui, à l'arrivée, contribuent à rendre le fonctionnement de nos sociétés aberrant, bien malgré eux.
En nous proposant le très beau portrait d'un homme simple, Brizé nous livre donc, sans nous faire la leçon, un regard terrifiant sur nos sociétés. S'il n'y avait eu d'infimes petites faiblesses sur deux ou trois points mineurs, La loi du marché n'aurait d'ailleurs probablement pas été loin du chef d'oeuvre!
L'avis de la rédaction :

Jean-Marie Lanlo: ****
Martin Gignac: ****
Sami Gnaba: ***½
Olivier Bouchard: ***½
Olivier Maltais: ****
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