13 décembre 2019

★★ ½ | Richard Jewell (Le cas Richard Jewell)

Réalisation : Clint Eastwood | Dans les salles du Québec le 13 décembre 2019 (Warner Bros.)
Critique acerbe de l'univers médiatique et des abus de pouvoir du gouvernement américain, Richard Jewell est un film qui expose la rapide ascension d'un bon samaritain au statut de héros ainsi que sa chute brutale avec l'étiquette de criminel. Réalisé par Clint Eastwood, le film prend le parti de raconter, du point de vue du présumé coupable, l'histoire vraie d'un gardien de sécurité ayant découvert un colis suspect lors des Jeux olympiques d'Atlanta de 1996. Sa rapidité à aviser les autorités en place permettra de sauver plusieurs vies. Cependant, pour le FBI, il deviendra le suspect numéro. S'ensuivra un cirque médiatique qui détruira tout sur son passage.
On pourra louer la prise de position du réalisateur et du scénariste. Tout en défendant le personnage de Jewell, il le définit comme un homme problématique, un homme au cercle social restreint, vivant chez sa mère, obsédé par les notions de la loi et l'ordre. Le but de son existence est de faire carrière dans les forces de l'ordre. Ce sont ses particularités, sa singularité en marge de la société qui feront de lui le parfait bouc émissaire.
La mise en scène du réalisateur, ainsi que l'interprétation sensible de Paul Walter Hauser, forment une combinaison gagnante. Après tout, le film nous propose l'histoire d'un homme un peu banal et étrange qui se fait engloutir par une suite d'événements qui le dépassent. Sans trop d'artifices ou d'effets cherchant à accentuer la tension dramatique ou orienter l'émotion, la mise en scène se calque au personnage principal. Jewell ne saisit pas tous les codes sociaux, il semble en constant décalage avec ses interlocuteurs et pourtant, il possède un aspect très humain dans lequel on pourrait peut-être se reconnaître. Cependant, le film bat de l'aile dans sa caractérisation des autres protagonistes. Les médias, personnifiés par une seule journaliste (qui semble être la seule dans la ville d'Atlanta), n'ont pas de sens moral, prêts à tout pour obtenir une primeur. Le FBI n'est qu'un bloc monolithique qui agit comme une force brute. Le problème n'est pas tant dans la critique, car on ne peut nier les problèmes flagrants liés à l'abus de pouvoir. Toutefois, on pourra dénoter de nombreux raccourcis au niveau de l'écriture en seconde moitié (l'enquête pour prouver l'innocence du personnage qui dure le temps d'une marche vers une cabine téléphonique ; la démonstration que la journaliste a finalement un cœur ; la finale qui laisse perplexe).
Malgré ses défauts, Richard Jewell fait écho au climat de névrose médiatique qui nous entoure encore aujourd'hui. Il est dommage de constater qu'il ne va pas au bout de ses idées.
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