19 décembre 2019

★★½ | The Twentieth Century (Le vingtième siècle)

Réalisation : Matthew Rankin | Dans les salles du Québec le 20 décembre 2019 (Maison 4:3)
Pour son premier long-métrage, le prolifique bricoleur Matthew Rankin n’a rien perdu de sa créativité. Effectivement, The Twentieth Century est une épopée « historique » mêlant avec plaisir l’animation, le cinéma expérimental, et les minutes du patrimoine canadien. En adaptant très librement la vie de Mackenzie King, politicien reconnu pour sa circonspection maladive, le réalisateur semble avoir trouvé le sujet idéal pour son saut vers le long-métrage mais, la surprise initiale passée, son film peine à garder le cap, cachant derrière son inventivité formelle un humour potache épuisant et un discours politique superficiel.
Les influences de Maddin sont évidentes (des influences qui se retrouvent jusque dans le casting) mais Rankin ne se contente pas d’être qu’un émule. Son film trouve des inspirations partout, des premiers temps du cinéma jusqu’au scrapbooking, faisant de The Twentieth Century un plaisir visuel certain. Cela étant dit, au fil des scènes, l’approche esthétique en constante réinvention de Rankin trouve ses limites. Les référents visuels n’approfondissent rien et les partis pris esthétiques empruntés ne servent que le geste créatif, n’ayant rarement plus de volonté que celle d’épater. Lorsque par exemple Rankin utilise régulièrement des acteurs en mode drag, il ne semble faire le geste que par excentricité artistique, celui-ci n’ajoutant rien à son discours, et lorgne vers la simple appropriation.
Par la vie de Mackenzie King, le réalisateur s’attaque joyeusement au marasme de la politique canadienne. Encore une fois Rankin fait habilement référence à plusieurs anecdotes de la vie de son sujet ou du monde politique canadien, mais l’humour s’attaque à des cibles faciles. En se moquant de l’hypocrisie de ses personnages, Rankin en arrive tout de même à répliquer leur discours, faisant sans grande créativité une blague de ses personnages au physique désagréable, des problèmes sexuels de son protagoniste ou en tombant dans l’humour scatophile. Si la même inventivité avait été appliquée à l’élaboration des gags qu’à l’aspect visuel, on aurait pu excuser la facilité des cibles, mais le film se suffit de son concept, délaissant son texte au passage. Rankin démontre certainement qu’il est capable de renouveler son esthétique sur la durée, mais en s’attaquant à son sujet toujours au premier degré, il fait un premier long qui s’essouffle rapidement.
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