8 avril 2022

★★★¾ | Cow

Réalisation: Andrea Arnold | Dans les salles du Québec le 8 avril 2022 (Cinéma du Parc)

Andrea Anold, réalisatrice notamment de Fish Tank et de American Honey, nous revient avec un documentaire qui délaisse l’adolescence au profit du monde animal. Cow met la vache au cœur de sa démarche. Peut-être devrions nous d’ailleurs plutôt dire : avec Cow, Andrea Arnold met sa caméra au cœur du troupeau. Elle y suit en effet une vache laitière (à l'exception d'une petite parenthèse avec un de ses veaux jusqu’à son départ de la ferme qui l’a vu naître), en restant toujours au plus près d’elle. Cette expérience hautement immersive, presque sans paroles (à l’exception des rares échanges des fermiers), nous fait vivre des bribes de vie d’une vache laitière pendant 94 minutes, de l’accouplement à la traite quotidienne, en passant par l’arrachement des petits et de rares moments de repos au champ (dont nous retiendrons un regard vers le ciel aux allures de méditation bovine particulièrement troublante). La force de Arnold est de nous montrer sans trop chercher à diriger notre regard. Ainsi, contrairement à Gunda (pour lequel j’ai plus de réserve que mon collègue, lire sa critique), Cow n’est pas une manipulation déguisée en expérience visuelle. Chez Armold, les images sont simples, jamais esthétisantes… et surtout, elle essaie de ne pas sombrer dans la facilité anthropomorphique (même si elle n’y parvient pas toujours totalement, ce qui est probablement la petite faiblesse du film). Elle se contente d’être au milieu des vaches, aux côtés de son sujet d’étude, avec la distance qui convient. Le trouble vient donc de notre observation de cette réalité plus que d’un message imposé, ce qui en augmente la force.
Ce sentiment trouve son apogée à la fin. Nous ne la raconterons pas, même si l’issue d’un animal de ferme est souvent la même pour une grande majorité. Pourtant ici, la fin de vie de la vache n’est pas celle qu’on anticipe. Une fin certes éprouvante pour le spectateur mais presque belle pour elle, très éloignée de celle de ses congénères qui connaîtront le stress de l’abattage à la chaîne. C’est la force du film : nous laisser comprendre la dureté des conditions d’élevage sans nous montrer le pire. Arnold n’impose pas un brûlot vegan simpliste, mais choisit de nous montrer juste ce qu’il faut pour nous donner envie de nous interroger sur notre rapport au monde animal. 
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