22 décembre 2023

★★★½ | Anselm – Le bruit du temps (Anselm – Das Rauschen der Zeit)

Réalisation: Wim Wenders | Dans les salles du Québec le 22 décembre 2023 (Métropole Films)
Wim Wenders aime à l'évidence la 3D (procédé qui pourrait pourtant sembler de plus en plus désuet) pour créer des films qui sortent vraiment de l'ordinaire. Plus de 10 ans après le très beau Pina, il nous livre avec Anselm – Le bruit du temps un nouveau documentaire en relief de grande qualité. Ici, Pina Bausch laisse la place à Anselm Kiefer, artiste contemporain que Wenders admire profondément. Le documentaire suit en partie les conventions du genre, avec des images d'archives et des scènes montrant l'artiste au travail, ce qui permet au cinéaste d'introduire l'œuvre et la démarche conceptuelle et thématique de l'artiste, offrant des pistes de réflexion sur l'Allemagne (son histoire, sa mythologie) et son lien avec le temps qui passe (et donc, avec la mémoire).
Au-delà de cet aspect, le film atteint son apogée lorsque Wenders embrasse pleinement son rôle de cinéaste/observateur de l'œuvre d'un autre artiste. Il se crée alors une fusion entre le travail de Kiefer et celui de Wenders. Cette fusion (un artiste film les œuvres d'un autre artiste) rappelle parfois la grâce des Ailes du désir, notamment par le choix de la musique, des images flottantes et de la voix off chuchotée. Cela est tellement évident que le spectateur a presque le sentiment, par (trop) courts instants d'une beauté impressionnante, de devenir l'ange Damiel, personnage inoubliable de l'œuvre majeure du cinéaste allemand. Comme l'ange jadis incarné par Bruno Ganz, nous devenons à notre tour des observateurs bienveillants, cherchant à comprendre à la fois la souffrance, les déchirures et la beauté du monde que le duo Kiefer/Wenders nous propose.
Pour ceux qui en douteraient, Anselm – Le bruit du temps n'a rien à voir avec un documentaire qui serait plus à sa place sur un écran de télévision que dans une salle de cinéma. Il s'agit bien au contraire d'une expérience immersive par excellence, un documentaire/essai à voir absolument en salle… et en 3D, bien sûr.
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