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20 novembre 2020

Cinemania 2020 | ★★¾ | Des hommes

Cinemania 2020 | ★★¾ | Des hommes

Réalisation: Lucas Belvaux
Sans aucun doute un des cinéastes belges les plus intéressants depuis 20 ans, Lucas Belvaux est un habitué du festival Cinemania. En adaptant le roman éponyme de Laurent Mauvignier, le réalisateur de La raison du plus faible et de Pas son genre change à nouveau de registre avec Des hommes, dans lequel il revient sur des événements survenus durant la guerre d’Algérie. Guidée par la mémoire de ses trois protagonistes, la construction narrative sous forme de flash-back procure au film cette dimension intime qui le distingue de ses pairs en matière de fresque de guerre. Derrière ce classicisme et cette sobriété, se cache un drame émouvant sur deux frères d’armes qui ont préféré se taire et dont le passé ressurgit lors d’une fête 40 ans plus tard.
Avec dans les rôles principaux Gérard Depardieu (plus imposant que jamais), Jean-Pierre Darroussin (avec son éternel air de chien battu) et Catherine Frot (plus effacée), Des hommes parle de racisme ordinaire et de blessures lointaines. En évitant la complaisance lors de ces moments plus tendus (voire cruels) ou un recours à une forme de bellicisme, le cinéaste s’en tient à l’essentiel, à savoir que personne ne peut échapper à son passé et aux conséquences traumatiques qui en découlent. Toutefois, l’intrigue piétine par moments et le rythme languissant tout comme le discours parfois insistant auraient mérité d’être plus resserrés. Mais malgré ses défauts, on y trouve quelques moments forts comme cette scène mémorable de fête qui est l’élément déclencheur d’un retour vers un passé beaucoup moins glorieux et vers cette tension latente qui règne au village depuis trop longtemps. On  y retrouve un personnage incarné par Gérard Depardieu (complètement ivre et au comportement disgracieux) qui renvoie à celui qu’il campait dans Uranus trente ans plus tôt dans le film de Claude Berri.
★★½ | Été 85

★★½ | Été 85

Réalisation: François Ozon | Disponible au Québec en cinéma virtuel à partir du 20 novembre 2020 (Axia Films
Film présenté au Québec dans le cadre du festival Cinemania 2020.

François Ozon tourne beaucoup. Environ un film par an. Sur le lot, certains sont très maîtrisés (dont les récents et excellents Franz et Grâce à Dieu). D’autres sont très surévalués et appartiennent aux sélections cannoises sans que l’on comprenne vraiment ce qu’ils font là. C’était le cas pour Jeune et Jolie. C’est également le cas pour Été 85.
Bien évidemment, Ozon a du talent et son film n’est pas dénué de qualités. Le cinéaste aime visiblement filmer ses personnages et les voir déambuler. Il sait aussi nous faire ressentir ce qu’il y a entre les êtres — il s’agit principalement d’un couple de jeunes hommes trop différents, mais aussi d’une mère qui vit le deuil de son mari à sa façon (un des meilleurs rôles de Valeria Bruni Tedeschi) et d’une jeune Anglaise qui met le feu aux poudres malgré elle.
Ajoutons aux réjouissances l’aspect film-synthèse, qui n’est pas sans charme (Été 85 semble en effet composé d’une somme d’éléments que l’on retrouve dans les films passés du cinéaste).
Et pourtant le film ne convainc pas totalement. Peut-être justement parce qu’il n’accorde pas assez de place à ce qu’il fait si bien (observer la montée du désir avant son délitement, imparable conséquence d’un amour entre un jeune homme trop sûr de lui et d’un autre qui ne l’est pas assez). Il préfère se focaliser sur un double suspense amorcé d’emblée (nous savons tout de suite que le jeune héros a commis un acte répréhensible... mais lequel? et que son amant est mort... mais comment?). L’anecdote (l’intrigue) prend le dessus sur le vrai sujet (l’évolution d’une relation entre deux amants), et le film prend l’eau comme un vieux voilier sous un orage normand, une journée d’été 85. Mais heureusement, en ces temps-là, la musique pouvait être bonne, et Ozon nous le rappelle avec une succession de choix musicaux qui nous ferait presque oublier les défauts du film. Presque !
Nostalgie, quand tu nous tiens!

16 novembre 2020

Cinemania 2020 | ★★★ | À l'abordage

Cinemania 2020 | ★★★ | À l'abordage

Réalisateur: Guillaume Brac
Après un premier long métrage documentaire (L’île au trésor, inédit au Québec), Guillaume Brac (l’excellent Tonnerre, prix du public à Cinémania en 2013) revient à la fiction avec À l’abordage. Cette comédie de vacances s’inscrit comme une suite logique aux Contes de juillet (un long métrage composé des courts métrages "L’amie du dimanche" et "Hanne et la fête nationale"). Avec À l’abordage, Brac s’intéresse à nouveau à la jeunesse dans un lieu de villégiature. Bien que les prémisses fassent penser au célèbre L'aventure c'est l'aventure de Lelouch ou encore au film Le ciel, les oiseaux...et ta mère, Brac propose une tout autre forme de récit. En digne hériter de Rohmer et de Jacques Rozier, À l’abordage est en quelque sorte une version masculine et résolument actuelle du film Du côté d’Orouët. On retrouve ce même sentiment de liberté et de joie de vivre qui se dégage de cette œuvre à la fois ludique et tendre.
À l’abordage se laisse bercer par les eaux courantes tout en proposant un regard doux-amer sur les relations amoureuses pour les jeunes trentenaires et moins d’aujourd’hui. Sans véritable fil conducteur, avec un film en partie improvisé et des comédiens pour la plupart non professionnels ou jeunes débutants, le réalisateur braque sa caméra dans le sud de la France alors qu’on suit les mésaventures à la fois drôles et moins drôles de ces personnages en quête de sens. 
Spontané, tourné sur format pellicule 35 mm, le film procure une bouffée d’air frais, surtout si on le compare aux comédies populaires lourdaudes telles que la série de films Camping par exemple. Bref, on passe un moment agréable en compagnie de personnages attachants dans ces tranches de vie qui s’avèrent un récit initiatique (et marquant) pour cet improbable trio.

15 novembre 2020

Cinemania 2020 | ★★★ | Mica

Cinemania 2020 | ★★★ | Mica

Réalisateur: Ismael Ferroukhi
Huit ans après Les hommes libres, le réalisateur français d’origine marocaine Ismael Ferroukhi retourne à ses racines avec Mica, un beau drame sportif à propos d’un enfant issu d’un bidonville de la banlieue de Meknès qui se retrouve propulsé comme homme à tout faire et découvre une passion pour le tennis. Mais le principal enjeu de ce film empli d’humaniste n’est pas tant le sport en tant que tel, mais le parcours que fera le personnage-titre afin d’y parvenir. Le réalisateur dresse un portrait de cette jeunesse appauvrie et sans avenir dont le destin semble dessiner d’avance. Sans tomber dans le piège du misérabilisme, il propose un récit d’apprentissage à la dure (humiliations, brimades, punition corporelle) auquel est confronté le petit Mica (Zakaria Inane, un jeune non professionnel qui fait ses débuts bouleversants au cinéma). Il sera ensuite aidé par le gardien du club de tennis (Azelarab Kaghat) puis par une ex-championne (Sabrina Ouazani, excellente) qui va le prendre sous son aile et lui montrer les bases du jeu.
Même si le film emprunte certains clichés associés au drame sportif en seconde partie, il renvoie également un peu au cinéma iranien (en particulier celui de Jafar Panahi) dans sa façon de traiter des inégalités et l’absence de liberté tout en proposant une belle leçon d’humilité sur le passage à la rude de l’enfance à l’âge adulte. Attentive, la mise en scène de Ferroukhi se cache souvent derrière son sujet et évite le mélodrame et le didactisme. En refusant la fuite vers l’Europe. Mica trouve d’abord cette quête de liberté par lui-même et par ses choix décisifs en lien avec son avenir.

10 novembre 2020

Cinemania 2020 | ★★★¼ | Deux moi

Cinemania 2020 | ★★★¼ | Deux moi

Réalisation: Cédric Klapisch
À l’aube de la soixantaine, le cinéaste français Cédric Klapisch continue de s’intéresser à la jeunesse avec Deux moi, son treizième long métrage à ce jour. En empruntant le sentier de la comédie romantique, le réalisateur du Péril jeune dresse un portrait en finesse de deux trentenaires au destin et au parcours noués. Ce distingue Deux moi de nombreux autres films du même acabit, c’est cette belle humanité et cet amour pour ses deux personnages liés par le destin. Rémy et Mélanie (François Civil et Ana Girardot, attachants et justes) sont non seulement les victimes de la solitude des grandes villes, mais aussi de ce monde d’aujourd'hui où les réseaux sociaux dominent la vie d’une génération entière. Mais malgré leurs nombreux déboires et leurs difficultés à s’adapter au mode de vie moderne et urbain, le cinéaste et coscénariste ne cherche pas ici à faire le procès de la génération Y ni à la juger. Il préfère lui offrir des outils ou des pistes de solutions par l’entremise des deux personnages de psychologues campés avec autant de délicatesse par le duo de Camille Cottin et François Berléand.
Avec ce portrait doux amer de deux âmes en perdition, Klapisch nous envoie comme message qu’il faut apprendre d’abord à s’aimer et à être confortable avec soi-même avant de pouvoir franchir l’étape suivante qui est celle d’une rencontre… amoureuse. Le chemin emprunté par les deux personnages est beaucoup plus intéressant que le dénouement, connu d’avance. Dans un style branché où l’esbroufe du début laisse sa place aux vrais sentiments, Klapisch fait mouche et le charme qui se dégage de ce feel-good movie est bien agréable.