12 mai 2017

Risk **½

Après s'être intéressée à Edward Snowden dans Citizenfour, la réalisatrice Laura Poitras prend maintenant comme sujet d'étude le créateur de WikiLeaks, Julian Assange.

Réalisé par Laura Poitras | Dans les salles du Québec le 12 mai 2017 (Métropole)

Si Edward Snowden et Julian Assange sont souvent associés dans l'idée que certains se font du héros du 21e siècle, les deux hommes et leurs actions sont très différents. Le premier semble sincère dans sa lutte contre l'intrusion dans la vie privée. Le second est clairement plus ambigu et son combat va bien au-delà: en publiant une impressionnante somme de documents en tous genres, sans chercher à en mesurer les conséquences, il nie à la fois le rôle des journalistes (entre autres, celui de filtrer l'information) aussi bien que la logique des services des renseignements, de la diplomatie, de la politique internationale (toute vérité n'est pas bonne à dire)... mais aussi de la vie privée (certains des documents qu'il diffuse en relèvent)! Il est d'ailleurs amusant de voir à quel point un homme qui prône la transparence absolue (même lorsque celle-ci peut avoir un impact qui le dépasse) opte pour un point de vue inverse lorsqu'il est question de lui-même! Il est regrettable que ce paradoxe soit uniquement survolé par Poitras! Elle ne nous permet pas non plus d'en savoir plus sur la personnalité ou les motivations d'Assange.
En plus de passer à côté de ces deux véritables sujets potentiels, Poitras fait aussi ressortir ses propres contradictions. Alors qu'elle semblait défendre les actions d'Assange il y a encore peu de temps (tous les comptes-rendus du film lors de sa présentation à Cannes en 2016 témoignent de son parti pris), elle a changé son fusil d'épaule (ainsi que certains éléments du film) depuis l'affaire Hillary Clinton (et le rôle supposé de Wikileaks dans l'élection américaine).
En clair, ce que nous dit Poitras à travers ses deux versions du film est simple: oui à la transparence absolue, sauf lorsque ça ne fait pas mon affaire! Au moins, elle a fini par prendre conscience des limites de ce qu'elle défendait et ne fait que donner plus de force au paradoxe énoncé plus haut!
Cette prise de recul (même si elle est un peu tardive) n'est cependant pas le seul point qui sauve le film. Certaines scènes restent de véritables témoignages de l'histoire récente, vue de l'intérieur, et conservent à ce titre un véritable intérêt!
Dans un autre ordre d'idées, la rencontre entre Assange et Lady Gaga en dit également beaucoup sur la médiocrité d'une autre idole mondiale de notre époque. En multipliant les questions affligeantes de bêtise et en ne prenant pas même le temps d'écouter les réponses d'Assange, Lady Gaga consterne par sa bêtise, et montre ainsi à celles et ceux qui l'admirent que sur la route de la gloire et du succès, l'intelligence est moins important qu'un ego démesuré. Une belle leçon de vie en somme!
L'avis de la rédaction :

Jean-Marie Lanlo: **½
Martin Gignac: ***½
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