23 mai 2020

★★¾ | Adults in the Room (Conversations entre adultes)

Réalisation : Costa-Gavras | En VSD au Québec à partir du 22 mai 2020 (Cinéma du Parc)
Avec Adults in the Room, Costa-Gavras revient sur un épisode qui a marqué l’histoire récente de la Grèce (et de l’Europe), en prenant le point de vue d’un des protagonistes, Yanis Varoufakis, alors ministre de l’économie dans le gouvernement d’Aléxis Tsípras. Ce point de vue, assumé dès le départ (le film est l’adaptation du livre écrit par Varoufakis en personne) est particulièrement risqué lorsqu’il s’agit de traiter un événement historique récent, mais Costa-Gavras a l’intelligence de désamorcer d'emblée de possibles critiques (la subjectivité des faits relatés) en ajoutant une voix hors-champ, dispensable d'un point de vue narratif, mais qui a le mérite d’insister sur le parti pris (et donc de l’assumer). Malheureusement, si le procédé atténue les critiques potentielles, il ne les rend pas caduques en raison du manque de nuance dans la caractérisation des personnages. Certes, film à la première personne oblige, Varoufakis a le beau rôle, est charismatique, comprend tout plus vite que tout le monde. Mais le portrait du reste des protagonistes est particulièrement malhabile. Ils sont soit totalement insignifiants (à l’image du “traître” Alexis Tsípras), soit caricaturaux (comme le ministre allemand Wolfgang Schäuble). Seul, peut-être, le personnage de Christine Lagarde (présidente du FMI ) est sauvé. Sur les plus de deux heures que dure le film, le petit jeu de massacre (du genre “personne à sauver sauf moi”) finit par lasser. Il finit aussi par désamorcer une réflexion qui aurait pu être passionnante sur l'action politique (convictions/realpolitik; conquête du pouvoir / conservation du pouvoir; etc.)
Tout ceci est fort dommage, car le travail de scénarisation de Costa-Gavras est impressionnant dans sa manière de simplifier et de rendre tout à fait compréhensible par le plus grand nombre un épisode plutôt complexe.
Avec une plus grande nuance (qui, il est vrai, n’est pas la qualité première du cinéaste), Adults in the Room aurait probablement pu être un grand thriller politico-économique. Il devra se contenter d’être un témoignage historique imparfait mais rondement mené... ce qui n’est déjà pas si mal!
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