15 octobre 2021

★★★½ | Bergman Island

Réalisation: Mia Hansen-Løve | Dans les salles du Québec le 15 octobre 2021 (Cinéma Du Parc)

Deux cinéastes américains s’échappent à l’île de Fårö, où Ingmar Bergman résidait, en espérant y trouver l’inspiration nécessaire pour leur scénario respectif. Dans les mains de tout autre cinéaste, Bergman Island aurait probablement été un exercice métatextuel lourd, mais Mia Hansen-Løve approche son sujet avec une touche légère, parfois amusée et parfois sincère, qui lui permet d’éviter de faire son film une œuvre outrancièrement révérente.
Évidemment, l’omniprésence de Bergman dans le film permet à Hansen-Løve d’explorer quelques de ses ruminations sur la figure de l’artiste. Souvent, cette figure est ici confrontée à sa vie personnelle avec laquelle il peut, ou pas, être en adéquation. Dans ses pires moments, Bergman Island devient l’objet redouté : un objet cinéphile hermétique et qui se contente paresseusement de commenter sur sa propre nature. Toutefois, la réalisatrice tombe rarement dans le piège. Les références au maître suédois sont plus souvent anecdotiques et servent à remettre en jeu les conflits qui habitent les personnages, plutôt que de dicter strictement les aboutissants du scénario.
C’est donc, avec raison, la dynamique entre ses deux personnages qu’explore Hansen-Løve ici. Si, étant donné leur statut social, ils paraissent foncièrement privilégiés, la réalisatrice n’exagère jamais leur drame et se prive d’élan mélodramatique. Qui plus est, elle infuse à ses personnages assez de vécu  elle aurait été inspirée par le même parcours sur l’île de Fårö  et de sincérité pour les rendre crédibles, à défaut d’être vraiment sympathiques à l’audience. La mélancolie qui les habite est aussi triste que rêveuse. Loin de se lover dans une misère insoutenable, Bergman Island trouve un confort dans la possibilité d’être habité par ses souvenirs, aussi douloureux soient-ils. L’île de Fårö, autant par ses décors de fin d’été tranquille que par son importance dans l’histoire du cinéma, devient un lieu fécond pour les souvenirs imaginées par Mia Hansen-Løve.
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