8 juillet 2022

Lignes de fuite

Réalisation : Miryam Bouchard et Catherine Chabot | Dans les salles du Québec le 8 juillet 2022 (Séville)
Au moment décrire ce texte, les gros quotidiens du Québec ont déjà sortis leur critique. ★★★½ pour Le Devoir et Le Journal de Montréal, ★★★★ pour La Presse… À tel point qu’une question me taraude. Et si je n'avais pas vu le bon film? Ce film trop ostensiblement dans l'air du temps, qui prend un malin plaisir à enfoncer les portes ouvertes en cochant bien toutes les cases des sujets du moment, qui oublie que le langage cinématographique n'est pas fait que du dialogues et du jeu des acteurs et actrices, est-il bien celui qui reçoit les éloges! Bien évidemment, s'il s'agit bien du même film, je ne doute pas de la sincérité des personnes qui les ont dressées, et je suis heureux pour elles. J'aurais aimé partager leur enthousiasme. D’ailleurs, je dois admettre que la mise en avant de trois personnages féminins forts, dans un film coréalisé et produit par des femmes, fait plaisir à voir dans notre cinématographie. Je dois également admettre que la volonté de dresser un constat sur l’état de la société québécoise actuelle est louable, d'autant plus que cela est fait sans la moindre complaisance. Malheureusement, les intentions ne suffisent pas.
Pire: parmi les films québécois récents, si je devais choisir entre Lignes de fuite et Arsenault & Fils, je choisirais le film de Ouellet, qui parle de gens de régions que je ne connais pas, d'une histoire de braconnage, de gars pas intellos pour un sou qui ont des gros trucks, des chemises à carreaux et des guns (en clair, des gens que je ne connais pas non plus). Mais au moins, Ouellet sait écrire un scenario, sait dépeindre des personnages, et surtout, il sait réaliser des films, en faisant passer quelques idées aussi par la mise en scène (la position d'un corps, un geste, un regard, un petit rien). Je préfère ça à une adaptation théâtrale mal scénarisée (Émile Gaudreault, coscénariste, n'a pas fourni les films les plus subtils de notre cinématographie) et mise en scène comme une mauvaise série télé (avec quelques effets de mise en scène plus qu'une véritable mise en scène).
Mais comme c'est le début de l'été, je me permets de ne pas faire une critique du film, de ne pas attribuer d'étoiles. Et je retourne me coucher, en rêvant d'un film capable de nous regarder, en tant que société, droit dans les yeux, mais avec toutes les qualités qui font défaut ici. Dans le genre, le dernier commence à dater! Et depuis le temps, notre société a beaucoup changé.
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