Affichage des articles dont le libellé est cinemania. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est cinemania. Afficher tous les articles

16 novembre 2020

Cinemania 2020 | ★★★ | À l'abordage

Cinemania 2020 | ★★★ | À l'abordage

Réalisateur: Guillaume Brac
Après un premier long métrage documentaire (L’île au trésor, inédit au Québec), Guillaume Brac (l’excellent Tonnerre, prix du public à Cinémania en 2013) revient à la fiction avec À l’abordage. Cette comédie de vacances s’inscrit comme une suite logique aux Contes de juillet (un long métrage composé des courts métrages "L’amie du dimanche" et "Hanne et la fête nationale"). Avec À l’abordage, Brac s’intéresse à nouveau à la jeunesse dans un lieu de villégiature. Bien que les prémisses fassent penser au célèbre L'aventure c'est l'aventure de Lelouch ou encore au film Le ciel, les oiseaux...et ta mère, Brac propose une tout autre forme de récit. En digne hériter de Rohmer et de Jacques Rozier, À l’abordage est en quelque sorte une version masculine et résolument actuelle du film Du côté d’Orouët. On retrouve ce même sentiment de liberté et de joie de vivre qui se dégage de cette œuvre à la fois ludique et tendre.
À l’abordage se laisse bercer par les eaux courantes tout en proposant un regard doux-amer sur les relations amoureuses pour les jeunes trentenaires et moins d’aujourd’hui. Sans véritable fil conducteur, avec un film en partie improvisé et des comédiens pour la plupart non professionnels ou jeunes débutants, le réalisateur braque sa caméra dans le sud de la France alors qu’on suit les mésaventures à la fois drôles et moins drôles de ces personnages en quête de sens. 
Spontané, tourné sur format pellicule 35 mm, le film procure une bouffée d’air frais, surtout si on le compare aux comédies populaires lourdaudes telles que la série de films Camping par exemple. Bref, on passe un moment agréable en compagnie de personnages attachants dans ces tranches de vie qui s’avèrent un récit initiatique (et marquant) pour cet improbable trio.

15 novembre 2020

Cinemania 2020 | ★★★ | Mica

Cinemania 2020 | ★★★ | Mica

Réalisateur: Ismael Ferroukhi
Huit ans après Les hommes libres, le réalisateur français d’origine marocaine Ismael Ferroukhi retourne à ses racines avec Mica, un beau drame sportif à propos d’un enfant issu d’un bidonville de la banlieue de Meknès qui se retrouve propulsé comme homme à tout faire et découvre une passion pour le tennis. Mais le principal enjeu de ce film empli d’humaniste n’est pas tant le sport en tant que tel, mais le parcours que fera le personnage-titre afin d’y parvenir. Le réalisateur dresse un portrait de cette jeunesse appauvrie et sans avenir dont le destin semble dessiner d’avance. Sans tomber dans le piège du misérabilisme, il propose un récit d’apprentissage à la dure (humiliations, brimades, punition corporelle) auquel est confronté le petit Mica (Zakaria Inane, un jeune non professionnel qui fait ses débuts bouleversants au cinéma). Il sera ensuite aidé par le gardien du club de tennis (Azelarab Kaghat) puis par une ex-championne (Sabrina Ouazani, excellente) qui va le prendre sous son aile et lui montrer les bases du jeu.
Même si le film emprunte certains clichés associés au drame sportif en seconde partie, il renvoie également un peu au cinéma iranien (en particulier celui de Jafar Panahi) dans sa façon de traiter des inégalités et l’absence de liberté tout en proposant une belle leçon d’humilité sur le passage à la rude de l’enfance à l’âge adulte. Attentive, la mise en scène de Ferroukhi se cache souvent derrière son sujet et évite le mélodrame et le didactisme. En refusant la fuite vers l’Europe. Mica trouve d’abord cette quête de liberté par lui-même et par ses choix décisifs en lien avec son avenir.

10 novembre 2020

Cinemania 2020 | ★★★¼ | Deux moi

Cinemania 2020 | ★★★¼ | Deux moi

Réalisation: Cédric Klapisch
À l’aube de la soixantaine, le cinéaste français Cédric Klapisch continue de s’intéresser à la jeunesse avec Deux moi, son treizième long métrage à ce jour. En empruntant le sentier de la comédie romantique, le réalisateur du Péril jeune dresse un portrait en finesse de deux trentenaires au destin et au parcours noués. Ce distingue Deux moi de nombreux autres films du même acabit, c’est cette belle humanité et cet amour pour ses deux personnages liés par le destin. Rémy et Mélanie (François Civil et Ana Girardot, attachants et justes) sont non seulement les victimes de la solitude des grandes villes, mais aussi de ce monde d’aujourd'hui où les réseaux sociaux dominent la vie d’une génération entière. Mais malgré leurs nombreux déboires et leurs difficultés à s’adapter au mode de vie moderne et urbain, le cinéaste et coscénariste ne cherche pas ici à faire le procès de la génération Y ni à la juger. Il préfère lui offrir des outils ou des pistes de solutions par l’entremise des deux personnages de psychologues campés avec autant de délicatesse par le duo de Camille Cottin et François Berléand.
Avec ce portrait doux amer de deux âmes en perdition, Klapisch nous envoie comme message qu’il faut apprendre d’abord à s’aimer et à être confortable avec soi-même avant de pouvoir franchir l’étape suivante qui est celle d’une rencontre… amoureuse. Le chemin emprunté par les deux personnages est beaucoup plus intéressant que le dénouement, connu d’avance. Dans un style branché où l’esbroufe du début laisse sa place aux vrais sentiments, Klapisch fait mouche et le charme qui se dégage de ce feel-good movie est bien agréable.

9 novembre 2020

Cinemania 2020 | ★★★½ | L'audition (Das Vorspiel)

Cinemania 2020 | ★★★½ | L'audition (Das Vorspiel)

Réalisation: Ina Weisse
L’audition, c’est d’abord et avant tout le plaisir de regarder jouer l’actrice allemande Nina Hoss. L’actrice fétiche des films de Christian Petzold (Yella, Barbara et Phoenix) offre une performance tout en nuances dans ce second long métrage en tant que réalisatrice de la comédienne allemande Ina Weisse (L’architecte). Avec le thème de la musique comme trame de fond, L’audition est un film sur la perfection insondable qui alimente une professeure de violon qui prend sous son aile un jeune prodige timide chez qui elle voit un grand talent. Ce degré de perfection se manifeste également dans toutes les sphères de la vie, aussi bien familiale que professionnelle. C’est dans cette spirale obsessionnelle que les enjeux de ce drame psychologique poignant et intériorisé vont se dérouler. En l’espace de quelques semaines, tout bascule et cette inévitable perte de repères passe avant tout par les non-dits et le regard de son interprète et de ceux qui l’entourent.
Si le film emprunte certains sentiers connus comme la relation entre l’élève et son professeur exigeant qui le pousse à aller plus loin ou si la réalisatrice use d’effets dramatiques parfois un peu forcés pour atteindre son objectif, Weisse brosse avec réussite le portrait opaque d’une femme aux comportements méticuleux et abscons. Un portrait que Nina Hoss magnifie avec une force tranquille. Cette mer d’angoisses est refoulée ou éclate par à-coups au détriment des autres : c’est dans cette description et dans ce beau (et complexe) personnage féminin que le film se révèle une belle réussite, tout en offrant un regard sur la musique comme instrument de performance similaire à celui dépeint dans le Whiplash de Damien Chazelle.

7 août 2020

★★★★ | Chambre 212

★★★★ | Chambre 212

Réalisation: Christophe Honoré | Dans les salles du Québec le 7 août 2020 (Cinéma du Parc) 
Texte rédigé dans le cadre du festival Cinemania 2019

On aime Christophe Honoré quand il parle d’amour et se laisse aller à une forme de liberté formelle. Avec ce treizième long-métrage, le réalisateur des Chansons d’amour retrouve une de ses actrices fétiches (Chiara Mastroianni) dans ce conte fantaisiste sur le couple, l’infidélité et l’usure du temps. À la manière d’un Resnais des belles années ou encore d’un Woody Allen dans sa période fantaisiste, Chambre 212 est un film aussi amusant que virtuose. Avec cette mise en scène inventive qui nous fait oublier la présence d’un huis clos, c’est peut-être le film le plus réjouissant à ce jour du cinéaste. Un an à peine après le grave Plaire, aimer et courir vite, Honoré a visiblement eu envie de changer de registre et de s’amuser avec le cinéma et ses propres rouages.
On retrouve une forme de poésie légère dans cette façon d’aborder le couple avec ses riens et ses petits tracas. A priori, le sujet peut paraître lourd sur papier, mais le film ne manque pas d'humour et ce chassé-croisé sentimental qui allie de mêmes personnages du passé et du présent réussit son pari d’être à la fois émouvant et lumineux. On y trouve beaucoup de trouvailles visuelles qui l'enrichissent au lieu de lui mettre du plomb dans les ailes. Outre la radieuse Chiara Mastroianni, le reste de la distribution embarque dans cet univers et se laisse porter de manière loufoque et désinvolte.
Au final, ce film déluré et rempli de charme respire la créativité et le plaisir de filmer.
Certainement un des meilleurs films français de l’année.