1 avril 2011

Vénus noire ****

Paris, 1817. L’anatomiste français George Cuvier (François Marthouret), après avoir étudié la dépouille de Saartjie Baartman (Yahima Torres), arrive à la conclusion qu’il n’a « jamais vu de tête humaine plus semblable à celle des singes. »
Sept ans plus tôt, la jeune femme quittait son Afrique du Sud natale avec son maitre (André Jacobs) pour livrer une prestation scénique empreinte de sauvagerie dans les foires aux monstres londoniennes. Cette «Vénus Hottentote», l’icône des bas-fonds, se voyait artiste. Le regard du public était tout autre !

Réalisateur : Abdellatif Kechiche | En salles le 1er avril 2011 (Métropole Films)

Pour la première fois en quatre films, Abdellatif Kechiche délaisse une réalité sociale contemporaine pour s’attaquer à un sujet historique. Il continue de filmer avec une grande attention ses personnages (en passant d’un visage à l'autre avec un naturel et une fluidité impressionnants), tout en les intégrant parfaitement à un travail de reconstitution historique d’un réalisme saisissant. Les conditions étaient donc réunies pour faire revivre sous nos yeux cette «Vénus Hottentote», touchante de grâce et d’humanité. Plus que le symbole qu’elle est devenue par la suite, c’est la femme, dans toute sa complexité, qui semble intéresser le réalisateur. Mais au-delà de ce très beau portrait, Kechiche, jamais didactique, nous offre également des pistes de réflexions passionnantes sur le regard de l'autre, la science, la servitude volontaire… et sur les actes de personnages qu'il semble se refuser à juger (évitant ainsi au film de sombrer dans les écueils de la caricature ou du moralisme).
Après avoir vu cette Vénus noire, une conclusion s’impose : Abdellatif Kechiche n’est décidément plus juste un (bon) cinéaste social… il est indéniablement un grand réalisateur.

SHARE