23 décembre 2022

★★★ | The Whale (La baleine)

Réalisation : Darren Aronofsky | Dans les salles du Québec depuis le 21 décembre 2022 (Entract Films)
Dans son va-et-vient habituel entre réussites impressionnantes (Requiem for a Dream, Black Swan, Mother ! etc.) et plantages prétentieux (The Fountain, Noah, etc.)*, Darren Aronofsky nous propose The Whale, qui flirte avec la première catégorie, sans être pour autant totalement à l’abri de la seconde.
En adaptant une pièce de théâtre de Samuel D. Hunter, le cinéaste fait le choix du huis clos, ici totalement assumé. Le film y suit en effet la réclusion volontaire d’un homme hanté par son passé, à la recherche à la fois de rédemption (en renouant avec sa fille) et l’autodestruction (sa boulimie qui le transforme en un être difforme aux mouvements de plus en plus difficiles). Cet aspect du film est probablement le plus réussi. La mise en scène d’Aronofsky, son obsession à filmer à la fois un corps qui perd sa mobilité et une maison qui devient pour lui dans le même temps un véritable parcours du combattant, mais qui reste pour les autres une maison bien banale, est probablement l’aspect le plus intéressant du film. S’ajoute à cela une réflexion qui va bien au-delà de la rédemption, puisque le film aborde de nombreux sujets, globalement bien traités (et qui tournent globalement autour du thème du bien et du mal que l’on peut faire aux autres). Cela lui permet de mettre en scène des personnages qui vont progressivement faire évoluer le récit et la réflexion… jusqu’à ce que le scénario (signé de l’auteur de la pièce) prenne le dessus sur le film lui-même. C’est-à-dire jusqu’à ce que les mots de Samuel D. Hunter prennent le dessus sur la mise en scène de Aronofsky (et, indissociable, de la prestation notable de Brendon Fraser et de ses prothèses). Lorsque le tout est bien installé, le film se perd alors dans un manque de finesse qui nuit à la résolution de ses enjeux narratifs en enfonçant de plus en plus les portes ouvertes (et en usant de l’analogie avec Moby Dick de manière de moins en moins subtile et de plus en plus indigeste).
Mais parce qu’il n’y a pas que la dernière demi-heure qui compte, le film reste à voir. Il confirme aussi que malgré ses excès parfois critiquables, Aronofsky est un metteur en scène passionnant, une sorte de roi des montagnes russes, ce qu’il prouve ici au sein d’un même film, pourtant en apparence bien plus sobre que ses œuvres passées.

* La liste des réussites et plantages n'engage que l'auteur de ces lignes... Les avis sur Noah ou Mother !, pour ne citer qu'eux, ne sont pas partagés par tous au sein de cinéfilic.
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