9 août 2014

Fantasia 2014: le bilan

Killers et Ugly, prix AQCC ex-aequo
décerné par Apolline Caron-Ottavi,
Martin Gignac et Jean-Marie Lanlo
Comme tous les ans à la même époque, le temps est venu de faire le bilan du festival le plus imprévisible de Montréal. Pour sa 18e année, Fantasia semblait refuser d'accepter l'âge de la majorité en nous offrant un nombre très important de films consacrés à l'adolescence. Le plus réussi fut probablement Han Gong-ju, de Lee Su-jin (lire la critique d'Olivier Bouchard), qui avait opté pour une approche très réaliste.
De nombreux autres films abordaient ce sujet en multipliant les points de vu de façon très intéressante. Du sud-coréen Steel Cold Winter (Choi Jin-seong) à l'américain The Harvest (John McNaughton), de l'allemand Wetlands (David Wnendt) au japonais Puzzle (Eisuke Naito) ou du danois When Animals Dream (Jonas Alexander Arnby) à l'islandais Metalhead (Ragnar Bragason), Fantasia nous proposait un véritable tour du monde du sujet en flirtant aussi bien avec le gore ou le trash qu'avec le fantastique ou l'observation sociale. 
Malheureusement, ces films étaient dans l'ensemble plus prometteurs que pleinement réussis, ce qui fût d'ailleurs également longtemps le cas pour les films traitant d'autres sujets. Nous préférons certes les films imparfaits aux films trop lisses, mais en multipliant les films insuffisamment aboutis pendant plus de deux semaines, cette édition 2014 nous a un temps fait craindre le pire. Le très bon Starry Eyes, de Kevin Kolsch et Dennis Widmyer (lire ma critique), fut il est vrai projeté en début de festival, mais pour être à nouveau vraiment satisfait, il nous fallut attendre les tous derniers jours et la découverte des trois meilleurs films de cette édition (du moins à mes yeux): Killers, des Mo Brothers (lire ma critique), Ugly d'Anurag Kashyap (lire la critique d'Olivier Bouchard) et Real, de Kiyoshi Kurosawa (lire la critique d'Olivier Bouchard).
Avec cinq films sortant vraiment du lot, cette édition faisait bien pâle figure à côté des années précédentes. Pire, aucun film ne nous a vraiment impressionné comme ce fut le cas l'an dernier avec The Weight (Jeon Kyu-hwan), par exemple.
Heureusement, de nombreux films très intéressants malgré leurs imperfections ont justifié notre présence (et nous ont conforté dans notre amour de Fantasia). J'ajouterai brièvement trois titres à ceux déjà cités:
Cheatin' (Bill Plympton): Plympton se fait romantique. Le résultat est bourré de charme et fourmille de belles idées. Malheureusement, elles sont parfois un peu trop exploitées ou s'étirent un peu trop. Cela a pour effet de rendre le film un peu longuet.
Franck (Lenny Abrahamson): Le film commence comme une comédie pleine d'une charme tout britannique autour d'un employé de bureau qui se rêve musicien et compositeur rock. Il se dirige ensuite vers la chronique d'un groupe composé de personnes gentiment allumées jouant du rock expérimental. Petit a petit, des thèmes plus graves apparaissent : la recherche de la notoriété, le rôle de la création (et les raisons qui poussent à tout donner pour), mais aussi les problèmes de santé mentale. Devenant de plus en plus grave avec discrétion, ambitieux en paraissant léger, Franck pâtit de sa volonté d'être trop de choses à la fois et des maladresses narratives en découlent. Cependant, il n'en demeure pas moins un film au charme et à l'ambition évidents… malheureusement plus intéressant que vraiment touchant (ce qu'il aurait pu être).
Four Corners (Ian Gabriel): Le début, et notamment l'incursion du film dans le milieu des gangs de rue sud-africain, est particulièrement réussi. Malheureusement, assez vite, Four Corners multiplie les intrigues et les personnages plus ou moins pertinents. Non seulement il ne parvient pas à définir suffisamment chacun de ses personnages, mais en plus il donne l'impression de vouloir trop en mettre pour intéresser artificiellement le spectateur. Il finit par se disperser et nous perdre un peu. En étant plus sobre dans son écriture, ses indéniables qualités auraient probablement donné un résultat très convaincant. Dommage.
Malgré nos réserves plus importantes que les années précédente, ce cru 2014, s'il ne fut pas exceptionnel, fut tout de même très plaisant et riche en découvertes. Nous serons donc bel et bien là l'an prochain avec l'envie de découvrir de petites merveilles que seul Fantasia peut nous permettre de voir sur grand écran… histoire de confirmer que ce petit coup de mou de l'édition 2014 n'était que passager!
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