8 août 2011

Fantasia 2011: Le bilan

Bellflower, une des belles surprises de Fantasia
Avant d’aborder des considérations qualitatives, faisons un rapide bilan quantitatif de cette quinzième édition de Fantasia : plus de 100 000 spectateurs répartis sur trois semaines et demie de projections, 160 représentants des médias (provenant du Canada, mais aussi des États-Unis, de France, de Grande-Bretagne, d’Allemagne, du Brésil, d’Australie, du Maroc et du Danemark), 150 personnalités venues présenter leurs films (parmi lesquelles John Landis, Robin Hardy ou Lucky McKee) et 134 longs métrages présentés (dont dix-neuf premières mondiales).
Le bilan qualitatif est de son côté plus subjectif et non exhaustif (malheureusement, nous n’avons pas pu voir des films comme Love (William Eubank), Birthright (Naoki Hashimoto) ou Karaoke Dreams (Jean Leclerc/Leloup)), mais notre premier constat est cependant partagé par un grand nombre de festivaliers : le cinéma asiatique a déjà été en meilleure forme. Si peu de films asiatiques nous ont impressionnés, il y eut tout de même des exceptions comme Cold Fish (Sion Sono), prix du public du meilleur film asiatique partagé avec 13 Assassins (mélange improbable et plutôt réussi entre Les sept samouraïs et Azumi concocté par Takashi Miike). Toujours côté japonais, notons également la présence de Love & Loathing & Lulu & Ayano, dans lequel Hisayasu Sato, un des maîtres du Pinku eiga, porte un regard sans concession sur le monde du porno japonais. Le bilan est moins positif pour le reste du continent. La baisse de régime du cinéma coréen ne fait plus aucun doute (avis d’ailleurs partagé par le cinéaste Ryoo Seung-wan à l’occasion d’un Q&A). Hong-Kong a aussi connu de meilleures périodes et ce n’est plus vers ce pays qu’il faut se tourner pour être impressionné par des combats (le film de Yuen Woo-Ping est à ce sujet une catastrophe!). Il faut plutôt regarder vers la Thaïlande de Panna Rittikrai, dont le Bangkok Knockout (Prix du public Guru du film le plus énergique), n’est certes pas du grand cinéma, mais nous a offert quelques scènes de baston bigrement efficaces accompagnées d’une pointe d’humour particulièrement bienvenue!
Quittons maintenant le cinéma asiatique pour nous consacrer au cinéma de genre dans son ensemble. Si nous n’avons rien à redire à propos de films comme Kidnapped (le thriller ibérique techniquement impressionnant réalisé par Miguel Angel Vivas), The Silence (film policier allemand d’une belle maitrise signé Baran bo Odar), ou Super (Prix AQCC et dynamitage en règle du film de super héros par James Gunn), de nombreux films dont l’appartenance aux genres était moins évidente nous ont pleinement satisfait. Nous pensons par exemple au très beau drame King of Devil’s Island (Marius Holst) ou au très bon thriller / drame social Bullhead (Michaël R. Roskam) qui reçut le prix New Flesh pour la meilleure première œuvre. Mais les meilleurs films étaient probablement les plus personnels (d’ailleurs parfois proches de l’expérimentation), réalisés par des cinéastes pour qui le genre semble plus être un moyen d’aboutir à un cinéma d’auteur qu’une fin. Ces films étant les plus intéressants, nous en avons déjà parlé sur cinéfilic. Il s’agit de Beyond the Black rainbow, Bellflower (prix du public argent (ex aequo) du Meilleur film européen ou américain), You are Here, Bas-fonds ou Midnight Son.
Citons pour finir d’autres films intéressants : Another Earth ou Stake Land (dont nous avons également déjà parlé dans ces pages), mais aussi deux purs films de genre : Retreat (Carl Tibbetts), un bon petit huis-clos made in UK ou Burke and Hare (prix du public argent (ex aequo) du Meilleur film européen ou américain), une comédie très agréable signée John Landis… made in UK également!
Si nous ne souhaitons pas nous attarder sur les déceptions, nous devons tout de même signaler The Wicker Tree (sorte de parodie de The Wicker Man réalisée par Robin Hardy lui-même), Don't Go Breaking My Heart (il y a eu bien pire durant le festival, mais nous attendions à mieux de la part de Johnnie To) ou The Woman (Lucky McKee), surprenant prix du public argent du Film le plus innovateur, mais qui nous rappelle surtout qu’en en faisant trop et en voulant aller trop vite, on peut finir par passer complètement à côté de son sujet.
Au-delà des films, il y eut aussi un palmarès. Nous avons cité quelques prix au cours de cet article. Nous ne dresserons pas une liste exhaustive, mais nommerons tout de même le récipiendaire du Prix Cheval noir pour le meilleur film : Clown (Mikkel Nørgaard), un film danois écrit avec un lance-pierres et filmé avec les pieds. Il est certes très drôle et d’un mauvais goût assez réjouissant, mais nous ne pouvons nous empêcher de penser que ce prix était un peu disproportionné.
Mais ce qui compte dans Fantasia, ce sont les films plus que le palmarès. De ce côté-là, nous n’avons pas été déçus!
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